Battersea / Londres : polémique sur une réhabilitation
Brève

Battersea / Londres : polémique sur une réhabilitation

La Battersea Power Plant Station, fameuse centrale électrique londonienne immortalisée par Pink Floyd, est actuellement en cours de réhabilitation. Laquelle est contestée dans une chronique de Donatien Frobert, publiée par Le Courrier de l'Architecte.

Pochette de l'album Animals de Pink Floyd, 1977


Traçons d'abord un rapide historique du lieu. La Battersea Power Plant Station, BPS pour les intimes, a été construite entre 1931 et 1933. Elle n'avait alors que deux cheminées. Agrandie au lendemain de la guerre, elle en gagna deux autres.

La Battersea dans les années 30 et en 1960


L'arrêt de la production d'électricité de la centrale électrique, qui demeure le plus grand bâtiment de briques en Europe, se fit aussi en deux temps : 1975 pour la station A, 1985 pour la station B. Très vite, l'endroit attira les convoitises : en 1988, sous l'ère Thatcher, on envisagea de le transformer en parc d'attractions. À cette occasion, on en détruisit le plafond de verre. L'opération finit par capoter, laissa l'usine ouverte à tous les vents.

La station A de Battersea en 1981,
avant la démolition du plafond
mais après celle des turbines


En 1993, un investisseur de Hong Kong tenta de reconvertir l'usine abandonnée en centre commercial, cinémas et piscine sur le toit. Il lâcha l'affaire en 2006. Deux ans plus tard, un promoteur irlandais voulut transformer le lieu et ses alentours en appartements de luxe (des détails du projet ici). En 2011, sa banque l'obligea à revendre.

Quelques vues du projet irlandais avorté


En mai 2012, le milliardaire russe Roman Abramovitch, propriétaire du Football club de Chelsea, tenta d'acheter la Battersea pour la transformer en stade de foute. Deux jolies zimages :


Son projet fut rejeté en faveur de celui d'un consortium malaisien qui racheta le bâtiment et les terrains attenants à la fin de l'année 2012 afin d'y bâtir des appartements, un centre commercial, un hôtel et des bureaux, aujourd'hui en cours de construction. Quelques jolies zimages itou :


L'un des charmes de la Battersea réside dans le fait qu'elle est isolée, qu'elle trône tel un château-fort au-dessus de la Tamise. « Ici, les douves sont les dix-sept hectares d'anciens réseaux de voies ferrées qui servaient à acheminer le charbon directement des quais de déchargement jusque dans la gueule de la bête », écrit Donatien Frobert dans Le Courrier de l'Architecte.


À l'issue du chantier actuel, l'ancienne usine sera enfermée dans une gangue d'immeubles de luxe qui l'absorbera presque entièrement. Seule sa façade restera visible telle une image de marque, Regardez-c'est-là-que-j'ai-acheté-un-très-joli-appartement-terrasse-une-folie :


Donatien Frobert s'énerve contre ce type de rénovations transformant d'anciens lieux industriels en surfaces de vente : « Acheter ses survêtements dans d'anciens docks où des damnés de la terre déchargeaient des caisses à bout de bras à longueur d'année, au-delà d'une ironie très noire, n'est-ce pas une trahison pire encore ? Eviscérer ces bâtiments pour les farcir de jolies échoppes alternatives, les consolider pour en changer la destination, les rajeunir à l'infini, les travestir, leur faire subir des liftings successifs pour cacher le vieillissement... Il y a de quoi être surpris par un tel acharnement thérapeutique dans des sociétés aussi attachées au droit de mourir dignement. »

C'est donc, fort logiquement, la destruction que le chroniqueur souhaite pour les anciens bâtiments industriels. Même s'ils sont, comme la Battersea Power Plant Station, classés monuments historiques.

« Entre, d'une part la démolition pure et simple, une photo souvenir, on dynamite puis on pleure un chef-d'oeuvre perdu ou, d'autre part, la titanesque opération de régénération en cours, vampirisation dudit chef-d'oeuvre qui en détourne toute la beauté, le dilemme existe. »

Sauf que de dilemme il n'y a point car si cette centrale électrique était détruite, les promoteurs y construiraient à la place d'autres immeubles d'habitation de luxe, un centre commercial encore plus grand surmonté par d'autres immeubles de bureaux, d'autres hôtels avec force piscines. Et ce quartier de Londres bordé par la Tamise ressemblerait un peu plus encore à celui de Pudong qui borde le fleuve Huang Pu à Shanghai. Les promoteurs immobiliers seront, hélas, toujours les plus forts.

Photo© ma pomme


Mais l'article de Donatien Frobert, intitulé Battersea Power Plant et le lifting de Gloria Swanson, ne se résume pas à cette idée destructrice. Il est passionnant, il faut le lire, tout comme ses autres articles parus dans Le Courrier de l'Architecte.


L'occasion aussi de lire ma chronique de 2011 intitulée Manifeste contre la non-tour de Babel à propos de la tour Triangle qui devait se dresser place Balard, à Paris.




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