La Tribune : journalistes remplacés par des communicants
Brève

La Tribune : journalistes remplacés par des communicants

Des journalistes remplacés par des communicants ? C'est possible, c'est ce que vient de faire l'hebdomadaire La Tribune pour un dossier consacré à la politique culturelle. On n'arrête pas le progrès...

"Plus de culture pour moins de crise" : c'est la manchette de l'hebdomadaire La Tribune paru le vendredi 11 octobre. A la Une, la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti. A l'intérieur de l'hebdo, quatre pages consacrées au mécénat culturel et aux rapports entre culture et économie. Sur la dernière page du dossier, une interview de Filippetti. Il y est question de taxe sur les terminaux connectés, du budget en baisse de la culture, mais aussi de l'investissement créatif. Jusqu'ici rien d'anormal. Toutefois, il y a un hic. Le nom de la signataire de la quasi totalité du dossier : Valérie Abrial.

Cette signataire n'est pas journaliste, mais consultante en communication éditoriale ainsi que l'indique son site internet. Elle travaille donc pour des médias, mais aussi pour des entreprises. Dans le portrait de Valérie Abrial posté sur le site, on peut lire qu'Abrial a toujours davantage travaillé dans la communication que dans le journalisme. Elle a notamment travaillé pour le groupe de communication Hima présidé par Jean-Christophe Tortora, également propriétaire de La Tribune. Mélange de communication et de "journalisme" en somme. Pourquoi La Tribune fait-elle appel à des consultants pour faire du travail journalistique ?

Contacté par @si, Eric Walther, directeur de la rédaction de La Tribune, convient qu'Abrial est bien une "consultante en communication éditoriale", mais assure qu'il n'y a pas de "coup fourré" derrière cette pige. Selon lui, le sujet a été "monté rapidement et quelqu'un de la rédaction connaissait cette personne". Comme La Tribune n'a pas de journaliste spécialisé sur la culture et l'industrie culturelle, c'est "Abrial qui a été choisie". Sur le fond de la question -est-il problématique de faire appel à des consultants plutôt qu'à des journalistes ?- Walther convient que cela "peut poser effectivement un problème de crédibilité et de conflit d'intérêts". Il ajoute : "en même temps dans le cas d'espèce Abrial n'est pas conseillère au minitère de la Culture" et l'interview de la ministre a été faite avec une journaliste de l'hebdo". Enfin, analyse Walther, "nous ne sommes pas dans l'hypothèse où un consultant en com' pour Alcatel ferait les papiers dans l'hebdo sur le sujet." Contactée également, Valérie Abrial la "journaliste" consultante, n'a pas retourné nos appels.

En interne, cette décision a interpellé les journalistes. "Ce qui est étonnant c'est la double casquette de l'intéressée. Il y a, dans Paris, des tas de journalistes professionnels largement capables de faire ce job. Cela d'autant plus que son papier n'est vraiement pas très intéressant et n'apporte rien de nouveau" confie un journaliste. Pour lui ce nouvel accroc témoigne d'un rapprochement entre publicité et éditorial. Et de citer en exemple, un numéro paru l'an dernier qui avait créé un fort émoi en interne. Consacré à l'économie sociale et solidaire, financé entièrement par la BNP, le journal regorgeait d'interviews de salariés de la BNP. L'émoi suscité vient aussi des relations de plus en plus complexes entre marques, régies pub et rédactions. "Le brand content qui est cette pratique des annonceurs de fournir des contenus sponsorisés en ligne ou en print qui ont l'apparence du journalisme est de plus en plus répandue. Cela interroge les rédactions qui ont de moins en moins de possibilités de refuser ce genre de choses", raconte un journaliste. La presse numérique a d'ailleurs déjà été confrontée à ce type de problèmes, ainsi que l'avait révélé le JDN.

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