Maroc : repas alcoolisé, journaliste condamné
Après cinq mois de procès, la sentence est tombée hier au tribunal d'Aïn Sebaâ, près de Casablanca. Youssef Jajli, journaliste, a écopé de deux mois de prison avec sursis et de 50 000 dirhams (4500 euros) d'amende pour diffamation. Le reproche ? Avoir écrit, dans son hebdomadaire Al-An qu'un ministre avait organisé un somptueux dîner privé avec de l'alcool lors d'un déplacement à l'étranger. Son avocat et lui ont immédiatement fait savoir qu'ils comptaient faire appel, après cette "condamnation injustifiée". Ils ont également reçu le soutien de Reporters sans frontières. "Deux ans après l'adoption d'une nouvelle Constitution" dans le contexte du printemps arabe "cette condamnation à une peine privative de liberté pour diffamation, même avec sursis, et à une forte amende montre à quel point les promesses de réformes du code de la presse tardent à se concrétiser" s'insurge ainsi l'ONG citée dans un article du Monde. Youssef Jajili, condammné pour diffamation |
L'an dernier le ministre a porté plainte contre le directeur de la publication du magazine à cause de ses "allégations" visant à "porter atteinte à sa dignité et son honneur". De son côté, Jalili a maintenu ses affirmations pendant toute la durée du procès en conservant le nom des témoins et la facture du repas qu'il assure posséder, mais n'a pas produite, de peur de mettre ses sources en danger. Par ailleurs, son avocat a précisé que le ministre n'était pas directement accusé d'avoir consommé de l'alcool.
Ce n'est pas la première fois que ce genre d'évenement se produit. En 2009, après un procès éclair de deux semaines, le directeur de l'hebdomadaire Al Michaal avait écopé d'un an de prison ferme, après avoir dénoncé "l'état de santé précaire" du roi Mohamed VI. Deux autres membres de la même rédaction avaient également été incarcérés pendant 3 mois pour cette affaire. C'est toute la presse marocaine qui s'était alors embrasée suite à cette condamnation alors que le Maroc était sur la voie de la liberté d'expression. La cour avait refusé la comparution de témoins clés dans l'affaire, décision que l'avocat de la défense avait vivement critiquée.
Par Charlotte Chauvinc.
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