Le ministère de la Justice américain a, secrètement, récupéré la liste des appels téléphoniques d'une centaine de journalistes de l'agence AP pendant deux mois sur des lignes téléphoniques, fixes et mobiles, personnelles et professionnelles. Aujourd'hui AP s'insurge et dénonce cette "intrusion massive et sans précédent" dans son travail de collecte de l'information, "sans aucune justification possible".

Le ministère de la Justice a lancé cette procédure après la publication d'une dépêche AP, évoquant, le 7 mai 2012, l'intervention de la CIA pour déjouer un complot terroriste au Yémen pour faire sauter un avion se dirigeant vers les USA. Le ministère voulait identifier les sources d'AP, qui avait différé la publication de la dépêche concernée pendant quelques jours, à la demande de la Maison Blanche. En février, le directeur de la CIA avait été interrogé par le FBI qui le soupçonnait d'avoir été la source d'AP. AP envisage de porter plainte. Embarrassée, la Maison Blanche a indiqué, par la voix de son porte-parole, ne pas être intervenue dans cette affaire, et ne pas être impliquée dans les décisions prises dans le cadre d'enquêtes criminelles.

AP a reçu le soutien de l'association des journaux américains (Newspaper Association of America). Dans un communiqué, l'association proteste et dénonce "ces actes qui choquent la conscience américaine, et violent la liberté de la presse garantie par la Constitution".

Une réaction globale et une solidarité logiques tant l'agence AP est une institution aux USA. Fondée en 1846, c'est une coopérative à but non lucratif qui emploie 3 200 personnes dans tous les Etats-Unis, et dans 280 bureaux à l'étranger. AP est de facto contrôlée par les journaux, les radios, et les télévisions américaines. Cette affaire d'écoutes est d'ailleurs à la Une du New York Times et du Washington Post.