Descoings, mots et silences
Brève

Descoings, mots et silences

Chambre d'hôtel. New York. Fait divers.

Personnalité française. NYPD. Incrédulité devant l'association de ces mots qui gazouillent sur Twitter, dès le réveil du matinaute. Images qui se bousculent. Directeur de Sciences po. Mort. Nu dans son lit. Télescopage inévitable avec "l'Affaire". Relire posément. Relier les éléments entre eux, construire une phrase à partir du puzzle des tweets. Le directeur de Sciences po Richard Descoings a été découvert mort dans sa chambre d'hôtel de New York, nu dans son lit. Faire la part des choses, sérier les composantes du fait divers: similitudes entre cette affaire et l'autre, différences, connexions possibles.

Pourquoi les premières descriptions insistent-elles sur le "nu dans son lit" ? Sans doute Descoings dormait-il nu, comme beaucoup de gens. Pourquoi livrer ce détail ? Les policiers qui le donnent, les journalistes qui le reprennent, savent-ils des choses qu'ils ne peuvent encore dire, veulent-ils nous faire passer un message ? Sont-ils eux-même inconsciemment prisonniers du "précédent", qui n'en est pas un ? Jusqu'à plus ample informé, évacuer toute connexion, toute relation. Rien à voir, sinon le lieu, un hôtel à New York. Ne rien écrire, donc. Ne pas rappeler "le précédent" qui n'en est pas un, et qui vient immédiatement sous la plume du New York Post, fidèle à lui-même. Lisez l'article jusqu'au bout: la cause est déjà entendue.

Que vont faire les radios ? France Inter évacue rapidement les circonstances de la mort de Descoings, pour développer ensuite la nécro traditionnelle du dirigeant disparu, avec témoignages des étudiants, etc. Zappons sur Europe 1: là, nous sommes déjà plongés dans l'enquête policière, dans le feuilleton qui débute, dans le polar. Le téléphone du défunt et son ordinateur portable auraient été retrouvés quatre étages en contrebas de sa chambre. Quatre heures avant sa mort, paraît-il, il dormait encore. La chambre était "en désordre", mais ce désordre peut être lié aux tentatives de réanimation. Dans tous ces rappels, aucun rappel de la récente polémique autour des primes de Descoings, et de toute la direction de Sciences Po. Pourquoi ? Pourquoi l'abondance de certains faits et de détails, l'absence de certains autres ? Certains s'avéreront peut-être importants pour la suite, d'autres insignifiants. Mais lesquels ? C'est dans la gestion journalistique de l'inévitable divagation que suscite une nouvelle totalement inattendue comme celle-ci, que se révèlent les inconscients journalistiques, individuels ou collectifs. Ce qui constitue d'ailleurs le principal intérêt de la nouvelle, à l'heure où nous mettons sous presse, comme on dit.

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