C'est en date du samedi 21 janvier 2012 que Le Figaro publia cette magnifique double page numérotée 2 et 3 :

Le mystère de la première traversée de l'Atlantique en avion à gauche, et une fabuleuse réclame - transatlantique elle aussi - à droite :

Oublions la page de gauche et observons sur celle de droite la réclame financière à tendance maritime qui tombe fort à propos, alors qu'on est encore en train de compter les victimes du naufrage du Concordia.

On y voit un navire transatlantique tout en pierre. Une espèce de falaise qui fendrait les flots avec à son bord une ville uniquement composée d'immeubles de bureaux, La Défense, peut-être. Cette banque transatlantique traverse l'océan, elle ne cesse d'avancer : "Avancer, c'est penser que l'on est jamais arrivé", nous dit l'affiche. Arrivé où ?

Aux Zétazunis, pardi. Car c'est une banque qui part de chez nous, des comptoirs du Crédit industriel et commercial, le CIC (c'est écrit en bas), et qui ambitionne de rejoindre les rives de New York, Wall Street, le paradis de la finance. Mazette !

Et pour bien signifier que cette falaise est un navire, nous avons, tout en haut, une proue avec une jeune femme appuyée au bastingage qui regarde au loin. Et l'on pense à cette pâtisserie cinématographique de James Cameron qui s'appelle Titanic, autre bateau qui tenta de traverser l'Atlantique :

Sauf que le Titanic, on sait comment ça a fini.

Allons allons, il ne coulera jamais, ce fringant vaisseau bancaire peut-être inspirée par le Rocher Percé de Gaspésie au Canada, puisque c'est une falaise :

Photo © http://www.canada-maps.org/

Ah bein oui c'est une falaise. Mais alors du coup, il n'avancera jamais non plus, ce navire, l'Amérique c'est pas pour demain. Ou bien il faudrait un ankou, un passeur d'âmes breton qui, tel celui du Vaisseau de pierre de Christin et Bilal…

Le Vaisseau de pierre de Pierre Christin et Enki Bilal,
Éditions Dargaud, 1976

…qui transporte le château du village de Tréhoët et tous ses habitants jusqu'à la Terre de Feu afin d'échapper à l'âpreté de promoteurs…

… transporterait le pognon des investisseurs vers des placements boursiers aux revenus mirobolants. Sauf qu'il n'y a pas d'ankou à bord de ce navire et par conséquent, le message est assez trouble, contradictoire : il nous dit que ceux qui placent leur pognon dans la Banque Transatlantique, établissement spécialisé dans la "gestion de fortune", ne sont pas arrivés. Car ce n'est qu'un navire immobile, un vaisseau de pierre à la proue duquel on regarde passer l'avenir.

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Elle n'est pas neuve, cette réclame. Elle s'était déjà affichée il y a un an exactement en compagnie de deux autres images conçues dans le même moule, en format plus large et sans slogan :

À l'époque, certains pipeules comme Stéphane Collaro et Mimi Mathy avaient assigné ladite banque en justice, laquelle "les auraient entraînés dans des investissements hasardeux" (dixit le blogue de Renaud Revel sur le site de L'Express, voir par là). Bah !

L'occasion de lire ma toute récente chronique intitulée Le Concordia, le Titanic et la Méduse.