"Féminisme à la française" : le débat se poursuit
Brève

"Féminisme à la française" : le débat se poursuit

Le débat se poursuit,

autour de la notion avancée par la sociologue Irène Théry de féminisme à la française, à l'occasion de cette tribune publiée dans Le Monde. Nous vous parlions des premiers éléments du débat via tribunes interposées dans cet article.

Petit résumé des épisodes précédents. Au départ, une première tribune de l'historienne américaine Joan Scott, spécialiste du féminisme français, publié dans la rubrique "forum" du New-York Times. Scott y estimait que la culture française a longtemps toléré des comportements de séduction lourde, à la limite du harcèlement, comme pouvait le faire Dominique Strauss-Kahn. Elle affirme même qu'un certain féminisme français, représenté par Mona Ozouf et Claude Habib, qui font l'éloge de "l'art de la séduction" a préparé le terrain à ce type de comportement. La sociologue Irène Théry lui répond dans cette tribune, parlant de "plaisirs asymétriques de la séduction, respect absolu des du consentement et surprise délicieuse des baisers volés". Joan Scott lui répond dans Libération : "Ce n’est pas là un féminisme dans lequel toutes les féministes françaises se reconnaîtront. (...)". Fin du premier round.

Dans Libé du 17 juin, les principales intéressées, Claude Habib, Mona Ozouf, Irène Théry, mais aussi Philippe Raynaud, écrivent une nouvelle tribune en réponse à Scott : "Féminisme à la française, la parole est à la défense". "De façon assez confuse, le procureur Scott reproche à la fois à Mona Ozouf de ne pas «opposer» les différences à l’égalité, de «subordonner» celles-là à celle-ci - et d’être hostile à l’égalité. Qui donc expliquera à Joan Scott que les différences s’opposent à la similitude, mais non à l’égalité, qui est tout autre chose?" écrivent les auteurs de la tribune.

Ce mercredi, nouvel épisode dans Libé, avec toute une page. Tout d'abord une tribune de Didier Eribon, qui estime que ce que Théry nomme "Féminisme à la Française" n'est en fait qu'une forme de "conservatisme". "Ce qui a été rebaptisé par ces auteurs «féminisme à la française» n’est qu’un mélange fort classique, et transnational, de poncifs antiféministes et d’homophobie militante", écrit le chercheur.

Il rappelle que "les livres de Claude Habib sont presque intégralement consacrés à dénoncer les méfaits des féministes françaises des années 1970 et, avant elles, de Simone de Beauvoir, qui auraient ruiné les jeux enchantés de la séduction entre les sexes." Selon lui, le dernier livre de Habib "prescrivait à «la femme» d’accepter de faire «don de soi», car la soumission féminine à l’homme dans le cadre du mariage et du «consentement amoureux» vaut mieux que la guerre des sexes déclarée par les féministes".

Dans cette même page, Scott livre une nouvelle tribune. "Je suis accusée par Claude Habib et ses collègues d’être sourde, sotte et aveugle, incapable de comprendre la prose élégante qu’ils commettent pour assurer la défense de ce qu’ils appellent le «féminisme à la française». Elle réitère : "Il n’y a pas de féminisme à la française. En France, comme ailleurs, le féminisme a toujours été pluriel et traversé par de vigoureux débats". Et critique la notion de galanterie : "en suggérant (...) que «la galanterie… compense l’inégalité des sexes par la politesse, par le respect et par la générosité», ces auteurs tentent de rendre opaques, en les voilant de rose, les problèmes créés par un rapport de forces inégales" . Elle se positionne pour un féminisme "universaliste", qui considère notamment que hommes et femmes n'ont pas à avoir de rôles différents dans la société, contre un féminisme différencialiste qui revendique au contraire une différence de nature entre hommes et femmes, différence qui se retrouve donc au sein de la société : "Le différentialisme défendu par Habib et ses collègues est aux racines de l’inégalité contre laquelle des féministes françaises luttent depuis si longtemps."

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