De la Cour au Sarkozistan
Brève

De la Cour au Sarkozistan

Paris, 16 septembre. Le Sarkozistan sait aussi s'amuser.

Alors que la crise politique et économique bat son plein, les médias officiels et officieux du petit Etat voyou d'Europe occidentale multiplient articles et couvertures à propos de deux livres, consacrés à la troisième femme de l'homme fort du régime. Il s'agit d'un ancien mannequin de haute couture, dont on se passe encore les photos nues sous le manteau, qui a "fait une fin", comme on disait naguère ici, en épousant le dirigeant après de nombreuses liaisons avec des chanteurs et des acteurs, de différentes générations, mais appartenant tous à la jet set.

La presse locale du petit Etat voyou l'appelle comiquement "la première Dame", rappellant ainsi son rapport obsessionnel d'attraction-répulsion avec le pays suzerain, les Etats-Unis d'Amérique.

Dès qu'elle a su que l'un de ces deux livres, insistant longuement sur ses anciens amants, était en préparation, la "première Dame" s'est empressée d'en favoriser un second, en recevant ses auteurs, et en ordonnant à son entourage de leur jeter quelques confidences piquantes.

Résultat : ce second livre semble plus alléchant que le premier (impression peut-être fausse, votre envoyé spécial n'a pas encore lu ces deux ouvrages). Il multiplie par exemple les anecdotes sur la manière dont la "première Dame" a diligenté des enquêtes de la police secrète à l'encontre d'une courtisane disgrâciée -que Sarkozy, en arrivant, avait même nommée ministre de la Justice- coupable de cancaner au téléphone sur ses liaisons supposées (celles de la première Dame) avec un chanteur à la mode. Il faut dire que l'un des auteurs du livre ainsi favorisé est le journaliste de la télévision d'Etat, chargé de suivre au jour le jour le mari-président. Cela facilite les choses.

A l'époque de ces enquêtes secrètes, la "première Dame" avait démenti, au micro d'une radio appartenant à un oligarque aimant se présenter comme le "frère" de l'homme fort, l'existence de toute enquête de police sur les rumeurs d'adultère. Comiquement, elle avait d'ailleurs été démentie elle-même par un des chefs de la police secrète. Ayant omis d'écouter la radio, le malheureux avait benoîtement confirmé qu'il consacrait une importante partie de son temps à cette affaire d'Etat. Il a néanmoins conservé son poste: au Sarkozistan, le chef policier est le dignitaire le plus difficile à révoquer. Son supérieur immédiat, le grand patron de la police, est d'ailleurs le même, qui a étouffé une procédure concernant son fils, qui roulait en scooter sur un trottoir des Champs-Elysées, ivre-mort. Comme nous le laissions entendre dans notre dépêche d'hier, la révélation de cet étouffement n'a d'ailleurs connu aucune suite, les leaders syndicaux de la police multipliant simplement les communiqués de soutien à l'agence officielle d'information, pour venir à la rescousse de leur patron. L'un d'entre eux a même argumenté que ces pratiques d'étouffement étaient courantes, s'agissant d'enfants de nomenklaturistes locaux.

Radio d'oligarque, télévision d'Etat, agence officielle : de tout ce qui précède, il ne faudrait pas déduire que les médias du Sarkozistan seraient, d'une manière idiote et univoque, soumis au régime. Dans ce vieux peuple, non sans charme d'ailleurs, et toujours si fier de ses très anciennes traditions de courtisanerie, les choses sont plus subtiles et plus raffinées. On n'interdit pas un livre désagréable : on le fait étouffer par un autre, regorgeant d'anecdotes séduisantes.

Surtout, la presse du Sarkozistan, bien qu'anesthésiée par les subsides gouvernementaux, garde encore un oeil sur ses courbes de ventes. Toujours soucieuse de séduire le public, elle a un maître plus implacable encore que le leader du régime : l'air du temps. Ainsi, dans ce peuple pourtant obsédé par son passé, rares sont les journaux qui ont critiqué la tirade d'une bureaucrate de l'union européenne (fédération d'Etats voisins du Sarkozistan, et souffre-douleur des dirigeants successifs de l'Etat voyou) quand elle a comparé implicitement les expulsions de Roms aux déportations des Juifs par les nazis. C'était évidemment excessif et stupide. Mais comme il était doux de voir une bureaucrate étrangère administrer au leader la râclée que la presse brûle de lui infliger, sans jamais l'oser à visage découvert.

NDR : devant l'intérêt de nos lecteurs, et l'abondance de l'actualité, la rédaction en chef de l'agence ouzbek d'information a pris la décision de prolonger jusqu'à nouvel ordre la mission de notre envoyé spécial au Sarkozistan.

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