Chabrol, cinéaste de l'immobile
Brève

Chabrol, cinéaste de l'immobile

"Trop de films bâclés et moches" : au moins c'est dit

, dans l'éditorial de Libé, qu'on ne pourra pas accuser de s'incliner excessivement sur le cadavre encore chaud de Chabrol. "La galerie des monstres chabroliens pouvait tour à tour exciter (sens du malaise, goût de la provocation) ou laisser indifférent (trop de films bâclés et moches)" : Libé aura évité l'écueil de se faire le porte-voix d'Isabelle Huppert, qui répète en boucle sa dévotion filiale, depuis dimanche soir, sur toutes les antennes.

Eva Joly, sur RTL, en a rajouté une louche lundi matin, rappelant qu'elle n'avait pas aimé L'ivresse du pouvoir, et que France 2 avait sans doute choisi ce film, dimanche soir, pour marquer la mort de Chabrol, parce que c'est celui "dont les droits étaient le moins cher". Les griefs de Joly envers ce film (dans lequel son personnage de juge d'instruction est incarné, justement, par Isabelle Huppert), elle les avait énoncés en détail dans une tribune au Monde, à l'époque, et ils sont si évidents qu'on pourrait les rappeler à sa place. Cinématographiquement nul, en effet (ah, ce grand piquet de Bruel, interprétant le nouveau PDG d'Elf, taupe de la juge, à grands coups de ricanements mécaniques qui en disent long), le film est aussi totalement bâclé, dans sa peinture d'une instruction judiciaire. Caractères, dialogues entre la juge et le PDG à sa merci : rien ne sonne juste.


Ce qui frappe par dessus tout, est la volonté obsessionnelle du cinéaste de les renvoyer, soigneusement, dos à dos. Il est ridicule et veule. Elle jouit de son pouvoir sur lui, jubile de lui balancer des "Monsieur le président" cérémonieux alors qu'il est menotté, prend un plaisir sadique à lui ressortir ses notes de frais, et les factures de la piscine payée par la boîte. Message : entre les deux, la petite juge et le PDG, pas un pour racheter l'autre. Renvoyés dos à dos, le PDG qui corrompt, et entretient sa maîtresse sur la carte de crédit de la compagnie, et la juge d'instruction qui l'envoie croupir en prison pour lui apprendre le sens de la vie. Bêtise et connerie sont partout, le salut n'est nulle part. Rien ne sert à rien, sinon peut-être de faire des films, ricanants et vengeurs. Cinéaste de l'immobilité provinciale, Chabrol fut aussi un cinéaste immobile.

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