Varoufakis : et il tua la Troïka...
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Varoufakis : et il tua la Troïka...

Enfin, un héros ! Commençons par l'anecdotique, le superficiel, l'image.

Le nouveau ministre des finances grec Yanis Varoufakis ne porte pas de cravate, (comme tous les ministres syrizistes), et il voyage en classe éco, comme l'a bien remarqué Twitter tout émoustillé. Une moto, un sac à dos, une silhouette de culturiste, et le crâne le plus photogénique d'Europe : voici la Grèce Bruce Willis, et voici immédiatement renvoyés aux seconds rôles les Draghi, Juncker, Sapin, et tous autres eurocrates encravatés.

Et en plus, il parle. Il parle grec, ce qui va être (et est déjà) source d'innombrables malentendus, la qualité de la traduction simultanée, dans les sommets, étant souvent ce qu'elle est. Si la photo de sa poignée de mains avec le président hollandais de l'eurogroupe Dijsselbloem, scellant la mise à mort de la Troïka, est déjà culte, de même que leur aparté "-You just killed the Troïka -Waoow !" savoir en quels termes exactement il a prononcé la condamnation est plus périlleux : bancale ? branlante ? boiteuse ? Au secours, les écouteurs ! Toujours est-il que dans le week-end, à en croire la presse allemande, Juncker prenait acte de la mort de la Troïka.

Mais surtout il parle anglais. Ce qui lui permet, dans une autre interview fondatrice, de recadrer en direct l'intervieweuse de la BBC, en imposant son discours à lui, pour déjouer les questions binaires dont l'Europe ne va pas manquer de le bombarder : alors cette dette ? Vous remboursez ou pas ? Il faut l'écouter en intégralité, dans ce match qui dévoile à la fois sa stratégie, et le système de défense de Syriza, face à la meute médiatique : surtout, ne pas répondre aux questions sur la dette, ni par exemple sur son encombrant allié Kammenos. Et parler d'autre chose. Il est vrai que, de la hausse du SMIC avec effet immédiat à l'arrêt des privatisations, en passant par la chasse à la fraude fiscale, et le refus théâtral par le "junkie" grec de sa prochaine dose à 7 milliards d'euros, les sujets ne manquent pas.

"Je n'ai jamais entendu de reportage aussi inexact"

Quel est l'objectif stratégique de Varoufakis , dans sa première tournée européenne ? Rétrograder ce boulet de la dette au rang d'un sujet parmi d'autres, pas plus pas moins que les réformes à accomplir en Grèce. Quant à la méthode, il l'énonce avec une candeur désarmante : "quand deux partenaires doivent discuter d'un problème, il y a deux solutions. Soit ils s'assoient l'un en face de l'autre, soient ils s'assoient côte à côte, et assoient le problème en face d'eux". Limpide. Sur cet objectif, il semble avoir convaincu Sapin de s'asseoir à ses côtés. Voir l'insistance du Français, lors du point de presse de Bercy, à lancer à la presse : "la dette, je sais qu'il n'y a que ça qui vous intéresse..." est un moment de jubilation inattendue. Donc, la France est Syriza : message certainement reçu par Merkel, qui jusqu'à présent, s'est bien gardée d'y répondre, montrant qu'elle n'avait pas encore compris qu'elle était dans une guerre de mouvement.

Dans l'imprévisible partie européenne qui s'est amorcée avec l'élection de Syriza, et où chaque jour de ces premières semaines compte pour dix, aucun de ces détails n'est anecdotique. Une période magique s'est ouverte, où chaque geste, chaque mot de Syriza seront performatifs. Non pas au sens, bien sûr, où gestes et mots suffiront à remporter la victoire. Mais ils configureront le champ de bataille, ses règles, ses codes, et c'est déjà énorme.

Certes, l'image ne fait pas tout. Et le choix par la Grèce, pour renégocier la fameuse dette, de Lazard, la banque du co-propriétaire du Monde Matthieu Pigasse, choix qui prend à contrepied les anti-Syriza, devrait compter aussi dans la bataille diplomatico-médiatique. Car cette partie ne se joue pas à huis clos. Elle se joue devant les caméras, à ciel ouvert, et Syriza montre qu'il en est parfaitement conscient. Qui va prendre l'ascendant psychologique ? Qui va écrire le scénario de la nouvelle saison ? Il ne faudra que quelques semaines pour le savoir. En tout cas, c'est bien parti.

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