Chypre divise (aussi) les économistes
Brève

Chypre divise (aussi) les économistes

Un pour, une contre : la mesure de taxe sur les dépôts bancaires à Chypre divise même au sein de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Céline Antonin, sur le Monde.fr, craint que la mesure déstabilise la zone euro quand Henri Sterdyniak, sur France inter, y voit une belle occasion de s’attaquer aux paradis fiscaux.

Que l’accord de taxation des dépôts bancaires chypriotes divise nos abonnés, c’est somme toute banal, mais qu’il divise les économistes de l’OFCE, c’est plus surprenant. Lundi en fin de journée, Lemonde.fr interroge Céline Antonin du département analyse et prévision de l’Observatoire. L’économiste n’est pas vraiment emballée par une taxe sur les dépôts qui risque de fragiliser l’économie chypriote mais aussi la zone euro. Selon elle, cette taxe, "associée à un relèvement de l'impôt sur les sociétés, risque de faire fuir les capitaux étrangers et, encore une fois, les capitaux russes. D'autre part, cette ponction sur la richesse des ménages va provoquer une chute de la consommation et, par conséquent, un effet récessif sur le produit intérieur brut."

Un plan d’aide "trop radical", une taxe qui "ouvre une boîte de Pandore" et laisse planer la perspective d’une "panique bancaire"… Si Antonin est très perplexe, ce n’est pas du tout le cas du directeur du département économie de la mondialisation de l’OFCE, Henri Sterdyniak. Invité ce matin à 8h20 au micro de Patrick Cohen, l’économiste assure au contraire que "c’est une très bonne décision". Pourquoi ? "Il faut absolument que l’Europe prenne des mesures fortes pour lutter contre les paradis fiscaux et pour imposer partout des taux raisonnables d’impôts sur les sociétés". Selon l’économiste (par ailleurs atterrés), le fait de "confisquer ces avoirs en provenance de l’extérieur va détruire le paradis fiscal". Enthousiaste, il convie même "à faire pareil avec les autres paradis fiscaux en Europe comme les Pays-Bas ou le Luxembourg". Sterdyniak considère cette taxe comme "un premier pas vers l’harmonisation fiscale" tout en concédant qu’elle est "une catastrophe pour les Chypriotes". Mais, conclut-il, "il faut en passer par là".

Deux sons de cloche à l’OFCE ? Selon Antonin jointe par @si, les divergences au sein de l’Observatoire ne sont pas si rares : "c’est vrai qu’on nous imagine comme un bloc monolithique alors qu’il y a chez nous des positions bien différentes." Même après l'analyse de Sterdyniak, elle reste sur son scepticisme initial : "je ne suis pas sûre qu’une taxe sur les dépôts bancaires aide à la lutte contre l’évasion fiscale ou le blanchiment d’argent. Les grandes fortunes utilisent des outils autrement plus perfectionnés et rentables qu’un dépôt dans une banque chypriote, même s’il est généreusement rémunéré. Bien sûr qu’il faut lutter contre les paradis fiscaux mais de façon concertée en Europe et pas dans une situation de crise". Elle rejoint cependant Sterdyniak qui, sur France Inter, déplorait la faible remontée du taux d’impôt sur les sociétés qui passe de 10 à 12,5%, soit le taux de l’Irlande considéré lui-même comme favorisant le dumping fiscal.

Antonin craint également une nouvelle crise de confiance. Selon l’économiste, la zone euro avait réussi à retrouver une forme de stabilité à la fin de l’année dernière après des mois d’atermoiements et de sommets de la dernière chance. Risquer de tout déstabiliser pour 6 milliards d’euros, ça n’en vaut pas la chandelle dit-elle. Sans compter que cette taxe va peut-être donner des idées aux Etats qui ont du mal à boucler leur budget. La France notamment ?

Faut-il donner la priorité à la lutte contre l'évasion fiscale, ou aux risques de "bank run" ? Ce ne sont donc pas deux sons de cloche mais deux approches totalement différentes, qui semblent s'opposer dans l'affaire chypriote, y compris dans un même observatoire économique.

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