Drones tueurs : le NYT brise l'embargo
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Drones tueurs : le NYT brise l'embargo

Le New York Times se rebiffe. A la demande de la CIA, le New York Times, le Washington Post et d'autres médias ont accepté dans un premier temps de ne pas publier des informations concernant l'existence et la localisation d'une base secrète de drones utilisés pour tuer des islamistes. Mais le New York Times vient de briser l'embargo, en soulignant le rôle, dans ces éliminations, de John O. Brennan, nouveau patron de la CIA choisi par Obama, après avoir été un homme clé de la politique de torture et de détentions illégales pratiquée sous Bush.


Dans un article publié à la Une sur deux colonnes, le New York Times évoque les effets collatéraux d'un raid de drone utilisé pour tuer des responsables d'un mouvement terroriste islamiste au Yemen en août dernier et révèle l'emplacement d'une base américaine secrète de drones située en Arabie Saoudite.

Jusqu'à présent le New York Times et d'autres médias avaient accepté de ne rien écrire sur le sujet. Mais finalement, le New York Times a décidé de briser l'embargo car le responsable de ce programme secret de drones, John O. Brennan, vient d'être choisi par Obama pour diriger la CIA.

Pendant le premier mandat d'Obama, Brennan a été le principal conseiller du président en matière de contre-terrorisme. Pourtant Brennan avait été très critiqué pour avoir soutenu l'utilisation de méthodes d'interrogatoires musclés pendant la présidence de George Bush.

L'article évoque la mort de Salem Ahmed bin Ali Jaber (40 ans), un imam qui a dénoncé Al-Qaïda lors d'un prêche en août dernier dans une mosquée à l'est du Yémen. Deux jours après, trois responsables d'Al-Qaïda sont venus le rencontrer un soir. Jaber a accepté de les voir en compagnie de son cousin, policier, venu le protéger. Les cinq hommes assis sous des palmiers ont été carbonisés par une volée de roquettes tirées par un drone depuis une base secrète américaine située en Arabie Saoudite.

Le New York Times ajoute que, depuis son bureau de la Maison Blanche, Brennan est le principal coordinateur de la "Kill List" et qu'il conseille Obama sur les raids qu'il doit approuver. Le journal précise que la campagne d'éliminations ciblées est critiquée par certains militaires (comme un ex-chef détat major) et responsables du renseignement de haut rang (comme un ancien patron de la CIA). Ils estiment que les campagnes de drones au Pakistan et au Yemen visent maintenant des militants de base qui ne représentent pas une menace directe pour les USA. Et que les morts de civils peuvent susciter des vocations de militants au lieu de diminuer leur nombre.

L'attitude du New York Times

Dean Baquet, le directeur de la rédaction du New York Times, explique que le gouvernement justifiait sa demande de garder le secret par le fait que si l'existence d'une base de drones américains en Arabie Saoudite était révélée au public, les Saoudiens pourraient décider de la fermer pour ne pas se mettre à dos leur population.

Baquet ajoute qu'il a rencontré la CIA, il y a un mois, et qu'il avait alors accepté de continuer à ne pas publier comme il le faisait depuis plusieurs mois. Mais l'annonce de la nomination de Brennan à la tête de la CIA et son audition par le Sénat ont changé la donne. Le quotidien a donc simplement prévenu les autorités qu'il allait publier un article sur le sujet.

Après la publication de l'article à la Une hier, la médiatrice du journal dit avoir reçu des protestations de lecteurs qui reconnaissent l'intérêt de publier des informations sur le sujet mais considèrent qu'il était inutile de révéler l'emplacement de la base. Ce à quoi la médiatrice a répondu que l'existence de ce programme de drones n'avait jamais été officiellement reconnue alors qu'il est significatif de la politique américaine dans cette région du monde.

La raison de la publication de l'article par le NYT vient aussi du fait que la chaîne NBC News a révélé un mémo (16 pages au format PDF ici) du ministère de la Justice qui donne les bases juridiques permettant à Obama de décider l'élimination de citoyens américains censés appartenir à Al-Qaïda.

L'éditorial du New York Times d'hier titré "Tuer un Américain" critique ce document qu'il voit comme une justification à posteriori. Pis, selon le Times, ce mémo rappelle ceux rédigés pour Bush afin de justifier les détentions illégales et les tortures. L'édito souligne par ailleurs que ce document de l'administration Obama n'a jamais été fourni au Parlement malgré les demandes répétées des élus...

Enfin, la médiatrice révèle que le New York Times a aussi engagé une action en justice pour obtenir un autre mémo concernant l'élimination d'un Américain lors d'un raid de drone qui a aussi entraîné la mort de son fils, un adolescent, lui aussi citoyen américain. Elle conclut en indiquant que si la rétention d'information a pu être justifiée dans le passé, cette époque est révolue.

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