Couvre-feu en Tunisie après une exposition
Brève

Couvre-feu en Tunisie après une exposition

Une centaine de blessés, 160 personnes arrêtées, des postes de police attaqués, un tribunal brûlé : de violents incidents ont éclaté en Tunisie, suite aux protestations d'islamistes contre une exposition jugée "sacrilège". Un couvre-feu a été instauré dans plusieurs régions du pays. "Violences criminelles dans plusieurs villes : De faux dévots, de vrais bandits", titre le quotidien tunisien La Presse.

"A l’origine du mal, comme le signalent certains, une exposition artistique déplacée qui n’a fait que mettre le feu aux poudres, installer le désordre et attiser la haine", accuse La Presse. Le journal parle des oeuvres exposées du 2 au 10 juin dans le palais d'Abdelia, dans la ville de La Marsa, non loin de Tunis. On y trouve par exemple ces bustes de femmes entourées de pierres, qui évoquent la lapidation.



"Parmi les œuvres les plus controversées, celles du peintre Mohamed ben Slama, auteur d’un tableau figurant une femme dénudée qui tient un bol de couscous à hauteur de son sexe, entourée de têtes d’hommes barbus ; sur un autre tableau, l’artiste a écrit "Bismillah" (au nom de Dieu) avec des fourmis qui rentrent dans le cartable d’un écolier à la place des lettres. Des islamistes y ont vu un cortège de fourmis étranglant un garçon au nom de Dieu", explique le site de France 24.

L'exposition a été saccagée par des islamistes, puis des incidents ont éclaté dans la rue, et dans plusieurs villes

"Un couvre-feu a été décrété à partir d’hier mardi dans huit gouvernorats, de 21h à 5h du matin, ont annoncé les ministères de l’Intérieur et de la Défense. Le couvre-feu sera observé dans les gouvernorats de Tunis, Ariana, La Manouba, Ben Arous, Sousse, Jendouba, Monastir et la délégation de Ben Guerdane (gouvernorat de Médenine)", indique La Presse.

Le ministre des Affaires religieuses, Noureddine Khademi, a déclaré sur les ondes de la radio Mosaïque FM que l'exposition artistique du Palais Abdellia était "provocante".Il a ajouté que "certaines œuvres de cette exposition vont à l'encontre des principes mêmes de l'Islam".

"Ce qui vient d’arriver à El Ibdillya est d’une extrême gravité, s'alarme dans une tribune de La Presse l'avocate Khedija El Madina. Le salafisme a frappé encore une fois. Encore une fois, c’est la culture qui est dans le collimateur. Ce n’est pas un hasard si les «troubles universitaires» dus aux salafistes ont régulièrement pour cible les arts et les humanités. Car la culture c’est l’art et l’art c’est la liberté de penser, c’est la liberté de rêver, c’est la liberté de créer, c’est la liberté de vivre."

Ceci d'autant plus que le ministre de la Culture,Mehdi Mabrouk, a annoncé des poursuites judiciaires contre l'association des arts de La Marsa, organisatrice de l'exposition. Il a estimé que les œuvres concernées sont d'un niveau artistique "très médiocre", que la plupart de ces artistes sont "autodidactes et n'ont pas fait une école d'art" et que "l'art doit être beau mais n'a pas à être révolutionnaire".

Pourtant, avant les incidents, le ministère de la Cuture avait annoncé l'achat par l'Etat de quatre tableaux de cette exposition.

Rached Ghannouchi, le leader du mouvement islamiste Ennahdha, qui fait partie de la coalition au pouvoir, a dénoncé à la fois les artistes et les manifestations violentes. Il a appelé à un rassemblement vendredi, pour défendre "le sacré et les objectifs de la Révolution". "Pour M. Ghannouchi, les violents affrontements qui ont suivi, accompagnés d'attaques contre des postes de police, des tribunaux, des sièges de partis politiques ou des locaux syndicaux, sont l'oeuvre de partisans de l'ancien régime de Zine El-Abidine Ben Ali qu'il a accusés d'exploiter le sentiment religieux et de «recruter» financièrement des salafistes «mais pas tous, pour semer le chaos»", écrit l'envoyée spéciale du Monde à Tunis."Non à l'extrèmisme des deux côtés", a-t-il ajouté. Pour lui, les artistes sont des provocateurs.

"On serait tenté de penser que l’appel de M. Ghannouchi répond à des préoccupations plutôt électoralesajoute, sceptique, le site Investir en Tunisie. Ennahdha a déjà tiré profit d’un événement analogue - le film Persépolis passé par Nessma TV - pour exciter le sentiment religieux chez les Tunisiens (nous en parlions ici, ndlr). Lors d’une conférence de presse, tenue mercredi 13 Juin 2012, au bureau du mouvement, le cheikh d’Ennahdha a affirmé que les personnes impliquées dans les derniers événements -actes de vandalisme et d’incendie qui visaient les biens publics et privés- ne sont pas des musulmans."

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