Juge d'instruction : une profession menacée (Mediapart)
69 postes supprimés depuis 2006, seulement six postes à pourvoir à la sortie de l'école de la magistrature en 2012. Les juges d'instruction sont de moins en moins nombreux. Interrogé par Mediapart, Marc Trévidic, juge antiterroriste en charge notamment d'un volet de l'affaire Karachi et président de l’Association française des magistrats instructeurs (AFMI) s'inquiète : "Dans les petites juridictions, faute de personnel, les juges d’instruction font un peu de tout, ils sont accaparés par d’autres tâches et ne peuvent plus faire leur métier dans des conditions satisfaisantes. (...) Il n’y a plus que 532 collègues en activité. On nous tue à petit feu". Conséquences concrètes : la collégialité, règle instaurée en 2008 pour limiter l'isolement du juge dans une enquête, est réduite. |
"On voit à nouveau des cabinets avec plus de cent dossiers en cours", déplore également Marie-Blanche Régnier, juge d’instruction et membre du bureau national du Syndicat de la magistrature (classé à gauche).
Si Sarkozy a renoncé à supprimer les juges d'instruction, la tentation du pouvoir de limiter leur travail est forte dans un contexte marqué par les affaires Karachi et Bettencourt. Au pôle financier du tribunal de Paris par exemple, ils ne sont plus que dix magistrats contre quatorze en 2009, d'après l'Union syndicale des magistrats. Outre le manque d'effectifs, "les juges d’instruction sont également victimes d’une politique pénale qui a été mise en place depuis plusieurs années : ils sont de moins en moins souvent saisis par les parquets. Les procureurs n’ouvrent plus d’information judiciaire, préférant se confier à eux-mêmes des enquêtes préliminaires", constate Mediapart.
De nombreux juges d'instruction estiment que c'est la mort annoncée de leur profession et commencent à s'organiser : à Versailles, des magistrats ont écrit le 19 mars une lettre au ministre de la Justice, Michel Mercier, pour contester la suppression d'un nouveau poste ; une journée "justice morte" s'est tenue dans l'Oise le 26 mars ; et des magistrats de Normandie ont organisé une conférence de presse le 2 avril pour protester contre une autre suppression de poste.
L'occasion de revoir notre émission avec le juge Marc Trévidic : "Un juge ne doit pas se croire dans le monde de Oui-Oui".
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