RGPP : bleus à l'âme des hauts fonctionnaires (Les Echos)
La RGPP serait-elle un fiasco? Elle n'a en tout cas pas convaincu Les Echos, pourtant peu connus comme un repaire de gauchistes. Mais de quoi s'agit-il exactement ? D'une politique de réformes, menées par le gouvernement depuis 2007, qui avait pour but initial de baisser les dépenses publiques tout en améliorant la qualité de la fonction publique. Lors de sa présentation en juin 2007, les hauts fonctionnaires étaient enthousiastes, comme l'explique le quotidien: "Quand le nouveau président de la République lance quelques mois après son arrivée cette gigantesque réforme de l'Etat, les hauts fonctionnaires applaudissent. (...) Ils croient en cet Etat modernisé, plus efficace, avec des fonctionnaires moins nombreux mais mieux payés que veut modeler Nicolas Sarkozy. Comme lui, ils sont persuadés, à juste titre, que l'administration doit se réinventer pour éviter l'obsolescence."
Mais cinq ans après, la plupart de ces hauts fonctionnaires sont amers: "En juillet 2011, l'Ifop les a interrogés pour la revue «Acteurs publics». «Selon vous, quels termes définissent le mieux la relation entre Nicolas Sarkozy et les hauts fonctionnaires» : la «défiance» et le «mépris» sont arrivés en tête avec 56% et 55%. La «confiance» et le «respect» ont recueilli 4%, la «reconnaissance» 2%..." Qu'est-ce qui explique ce revirement? "L'absence de concertation, tant la réforme a été pilotée en vase clos depuis Bercy, Matignon et l'Elysée, assurent Les Echos «Quand Eric Woerth [alors ministre du Budget, NDLR] a réorganisé Bercy, il n'a réuni la vingtaine de directeurs d'administration centrale concernés qu'une fois en deux ans!», illustre l'un d'entre eux. «Les décisions sont tombées d'en haut du jour au lendemain. Les cadres ont été dépossédés de leur capacité d'autoréforme», résume un directeur départemental des territoires. Ils ont en outre mal vécu de ne pas être associés à la fusion des corps qui accompagne la RGPP", explique le quotidien en donnant la parole à de nombreux fonctionnaires. En cause, la précipitation dans laquelle la réforme a été conduite: "Déménagements, refonte de services, pression accrue aux résultats, contrôle des dépenses: pour beaucoup, le réveil sonné au tocsin par l'Etat a été violent." Le tout sur fond de non remplacements d'un fonctionnaire sur deux (150 000 postes supprimés en cinq ans) et de restrictions budgétaires. Il en résulte une grogne croissante dans les rangs des cadres de l'Etat qui, si "elle provoque peu de départs vers le privé", pousse toutefois les agents de l'administration à "travailler vers une alternative politique".
A la CGT, on affirme même que "plusieurs centaines de hauts fonctionnaires sont entrés dans des think-thanks de gauche". Lors de ses voeux aux fonctionnaires du 12 janvier, Sarkozy avait promis plus de concertation pour les mesures à venir. Mais le mal a été fait : selon une étude du Cevipof, "le penchant naturel des cadres de la fonction publique pour le vote à gauche s'est accentué depuis la dernière élection présidentielle. "
Et pour parfaire vos connaissances sur la RGPP, vous pouvez (re)voir notre émission consacrée au sujet.
(Jamel Benhassine)
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