Quand Nestlé faisait espionner Attac
"Entre 2003 et 2008, dans le canton de Vaud, en Suisse, deux employées de l’entreprise de sécurité privée Securitas ont infiltré et espionné, pour le compte de Nestlé, la section locale de l’association altermondialiste Attac, qui préparait un livre consacré à la multinationale", raconte Le Monde Diplomatique. "Les faits remontent à l’automne 2003. Sous le pseudonyme de Sara Meylan, une employée de Securitas rejoint la section d’Attac Vaud, alors en pleine préparation du livre Attac contre l’empire Nestlé. Ayant gagné la confiance du groupe, elle participe à plusieurs réunions, où elle a accès à des documents confidentiels. Elle livre à Nestlé des comptes-rendus détaillés des discussions. Ses rapports mentionnent également des détails sur la vie privée des auteurs. Elle rédigera même un chapitre du livre en préparation. Peu après la révélation des faits, en 2008, une deuxième «taupe» de l’entreprise de sécurité sera confondue", détaille le mensuel. |
Pour leur avocat, "les altermondialistes ne représentaient «aucune menace» pour le groupe Nestlé. L'association s'est toujours bornée à des critiques non violentes et n'a jamais prôné de méthodes musclées contre la multinationale", indique l'agence de presse ATS en évoquant les arguments d'Attac lors de l'audience.
ATS cite aussi la défense : "Défenseur de Securitas, Gilles Robert-Nicoud a répliqué avec force à ces arguments. Il a dénoncé «les mensonges» colportés sur la mission des agents de sécurité: il ne s'agissait nullement de surveiller les rédacteurs d'un ouvrage mais bien de prendre des précautions pour protéger Nestlé dans un contexte extrêmement chaud, lié en particulier au Sommet du G8 à Evian de début juin 2003." "Le jugement sera rendu ultérieurement", conclut ATS.
La presse suisse a donné un large écho à cette affaire. Dès le 20 janvier, Le Matin lui consacrait une page, en donnant la parole à Béatrice Schmid d'Attac, qui demande avec huit autres militants des dommages et intérêts à Nestlé et Securitas.
Le Matin 20 janvier 2011
Le 25 janvier, le même quotidien évoquait le témoignage d'une des trois personnes de Securitas impliquées dans l'affaire : "Parmi les trois espionnes de l’entreprise Securitas, mêlée à l’affaire révélée par la TSR en 2008, Sara Z. est la seule à s’être présentée à la convocation. Ses deux collègues se sont désistées par courrier au dernier moment. S. J. estimant la situation «potentiellement dangereuse pour son intégrité physique». F. D., sa supérieure, dont le nom avait filtré dans les médias, a expliqué avoir dû réorienter sa vie à l’étranger car elle ne pouvait plus mettre un pied dehors sans se sentir menacée. Toutes deux encourent une amende."
La Tribune de Genève ajoute que "d'après un ex-secrétaire de l'organisation, la crédibilité d'Attac Suisse a également souffert de cette infiltration. Il lui est devenu difficile d'obtenir des informations et ses activités ont par conséquent été freinées. Un climat de suspicion s'est installé au sein de l'organisation"
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