"Weinergate" : comment le NY Post traite un "sex scandal"
Brève

"Weinergate" : comment le NY Post traite un "sex scandal"

Une étudiante américaine qui reçoit une photo d'un caleçon laissant deviner un sexe en érection, envoyé en début de semaine dernière par le compte Twitter d'un élu démocrate de New York. Le politique

, Anthony Weiner, qui jure d'abord que son compte a été piraté. Avant de reconnaître hier soir qu'il a bien envoyé cette photo. Plusieurs femmes qui clament avoir reçu de nombreux messages "sexuellement suggestifs" de Weiner, tout récemment marié. Sujet graveleux et jeu de mot facile... Ce scandale sexuel qui se déroule actuellement à New York permet de souligner comment travaille le New York Post, tabloid désormais connu en France parce qu'il est en pointe dans l'affaire DSK.









C'était bien lui. Hier, Anthony Weiner, le représentant démocrate de l'Etat de New york, a reconnu lors d'une conférence de presse qu'il était bien à l'origine de l'envoi de la photo du caleçon
à Gennette Cordova, une étudiante américaine de 21 ans, qui assure ne pas le connaître.


Avant le scandale, Weiner se préparait à être candidat à la mairie de New York en 2013. L'affaire passionne depuis plusieurs jours la presse américaine. Le 31 mai, parlant de"Weinergate" le New York Times y avait ainsi consacré un article. Aujourd'hui, le quotidien lui consace sa photo de Une. Il a assuré hier qu'il avait discuté de façon équivoque, et envoyé des photos, à six femmes différentes.

Apparemment, Weiner a reconnu les faits parce la chaîne ABC News s'apprêtait à publier le témoignage d'une femme avec qui il avait échangé de nombreux textos et messages érotiques. Une autre, travaillant dans un casino de Las Vegas, s'est dévoilée sur le site RadarOnline.com

Un tel scandale sexuel, sur son territoire, ne pouvait pas échapper au New York Post. Aujourd'hui, le tabloid multiplie les articles aux titres pleins de jeux de mots douteux, et difficilement traduisibles. Il faut dire que le nom de l'élu s'y prête aisément, un sexe pouvant être désigné de façon argotique comme une Wiener ("saucisse"), proche du nom de famille Weiner.

Le Post a multiplié les Unes sur les messages "obscènes", puis sur le mensonge de Weiner, depuis une semaine. Quitte à franchir la ligne jaune sur ses méthodes.

Lundi, le Washington Post a en effet épinglé en détail la façon dont le NY Post a piégé Gennette Cordova, l'étudiante destinataire de la photo du caleçon : un des journalistes du quotidien, Reuven Fenton, s'est fait passer pour un étudiant et a bavardé avec elle. Son récit a été transformé en interview exclusive et mis à la Une de l'édition de vendredi.

Mais via Twitter, Cordova a réagi : "J'ai été piégée par un reporter du New York Post qui n'a jamais dit qui il était, ni qu'il m'interviewait." Puis, s'adressant au journal, l'étudiante dit dans un autre Tweet : "Vous avez obtenu des informations par la ruse et vous les avez transformées en interview." L'étudiante a refusé de répondre au Washington Post, mais a ajouté sur son compte : "J'ai refusé de répondre à des émissions crédibles comme Good Morning America, pourquoi aurais-je donné une interview au New York Post?" La porte-parole du New York Post déclarait néanmoins : "Nous maintenons notre reportage."

Le fonctionnement du New York Post était aussi disséqué hier dans un intéressant article de Mediapart (accès payant).

"Brandissant au visage de tous ses détracteurs le sacro-saint «First Amendment» de la Constitution américaine, qui garantit la liberté d'expression et la liberté de la presse, le Post peut légalement traiter DSK de cochon, de pervers ou de crapaud en chaleur, ce qui est considéré comme un jugement personnel... Mais pas de violeur ni d'assassin, ce qui constituerait là une diffamation, rappelait Mediapart. Sexe, sport, ragots et scandales donc... La formule marche plutôt bien puisqu'il se vend chaque jour près de 510.000 exemplaires, à 50 cents."

Mais, soulignait le site, ce mélange détonnant ne fonctionnerait pas si le journal n'était, en même temps, une redoutable machine à scoops. La démonstration en a été clairement faite dans l'affaire DSK, que le quotidien a également honoré de multiples Unes à jeux de mots : "L'arrestation à l'aéroport, la sortie de prison, le refus des locataires d'accueillir ce nouveau voisin trop encombrant, les avances supposées faites à deux autres employées du Sofitel (ici), les tentatives présumées d'acheter le silence de la victime (ici)... Autant de gros coups du journal qui redonnent le sourire à son rédacteur en chef, Col Allan, souvent crispé par les difficultés financières récurrentes."

"Des centaines de «reporters de rue» sillonnent les coins stratégiques de la ville à la recherche de la moindre info croustillante. Ils ne mettent quasiment jamais les pieds dans les bureaux du quotidien, installés au 1211 de l'avenue des Amériques, à deux pas du Rockefeller Center. (...) C'est là que les infos des «reporters de rue» ou des photographes postés sur le terrain atterrissent. «Des rewriters sont ensuite chargés de rendre l'info plus alléchante grâce à leur style piquant, même si cela implique parfois une bonne dose de mauvaise foi ou tout du moins une certaine propension à embellir les notes qui leur arrivent», explique Jim Naureckas, membre de l'organisation «Fairness and accuracy in reporting» (Impartialité et exactitude dans le reportage). «Ils sont très forts pour mettre l'émotion nécessaire qui fera vendre plus facilement leur histoire.»"

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