Fukushima, et les petits caractères
Brève

Fukushima, et les petits caractères

Avez-vous vu, hier soir, au 20 Heures de France 2, le vice-président de Tepco

venir "s'excuser" devant les rescapés du tsunami, déplacés de la "zone de sécurité" autour de Fukushima ? Le grand maître de l'électricité s'inclinant devant les humbles: belle image.

C'est forcément l'image qui ouvre la séquence "aujourd'hui à Fukushima" du 20 Heures de Pujadas (la veille, c'était une grand mère rescapée après avoir passé plusieurs jours sous un frigo). Et évidemment, Pujadas n'en donnera pas le contexte, de cette image.

Le contexte, il faut aller le chercher en bas de la page 4 du Monde du jour. Comme je sais que vous n'avez pas forcément lu la page 4 du Monde, je vous le donne. D'après des documents Wikileaks, dès 2006, des diplomates américains avaient signalé à leur gouvernement les failles de sécurité de la filière nucléaire nippone, et particulièrement de Tepco. Et comme ils avaient davantage enquêté que Pujadas, ces diplomates américains pointaient même une raison de ces défaillances de sécurité: "la libéralisation du marché de l'énergie". "Nous avons vu trop de cas de compétitions axées sur la réduction des coûts et l'accroissement de la productivité, au détriment de la sécurité" écrivaient-ils. Je vous jure que je n'invente rien. Ce n'est pas notre site partisan du retour à l'âge des cavernes et à la bougie qui invente ça, ce sont les diplomates américains qui l'ont écrit. D'où les multiples carences de Tepco en matière de sécurité, les visites de sécurité bâclées, les rapports falsifiés, que souligne un autre article de la même page (à propos, saviez-vous que le président de Tepco n'est pas apparu en public depuis le début de la crise ?)

Heureusement, se rassureront les optimistes, tout celà se passe au Japon. Rien de tel évidemment ne pourrait arriver en Europe, continent où les mesures de sécurité sont prises et bien prises, et où les inspecteurs inspectent. Ah oui ? Je vous conseille donc vivement d'opérer un mouvement ascendant du regard, et d'aller lire le papier d'ouverture de cette même page 4 du Monde (décidement). Titré "cacophonie européenne sur la sureté nucléaire", l'article détaille les laborieuses négociations entre ministres de l'industrie, à Bruxelles, à propos de la manière dont on va tenter, si possible, si ça ne dérange pas trop, d'éviter des Fukushima européens. "Le flou subsiste quant aux procédures qui seront retenues, écrit Jean-Pierre Stroobants, correspondant du Monde à Bruxelles. La Commission européenne parle de la nécessité de choisir des experts indépendants, quand les Etats -dont la France- évoquent plutôt le rôle des autorités nationales de surveillance". Autrement dit, si je traduis bien (mais vous me détromperez dans le cas contraire), la position française est la suivante: pas question que des indépendants, a fortiori étrangers, viennent mettre leur nez dans nos câbles électriques usés, et nos groupes électrogènes rouillés. Laissez-nous gérer seuls, entre experts plus ou moins sous contrôle, la rouille tri-co-lo-re de Fessenheim, par exemple (au hasard).

Voulez-vous connaître ma chaîne de télé idéale, ma radio idéale, ou mon journal idéal ? Celui (ou celle) qui mettrait à la Une les infos que je viens de détailler ici, plutôt que tout ce que vous avez vu hier soir, ou entendu ce matin. Où le citoyen ne serait plus obligé d'aller chercher l'info dans les petits caractères, comme dans les contrats d'assurance. C'est trop demander ?

Partager cet article Commenter

 

Cet article est libre d’accès
En vous abonnant, vous contribuez
à une information sur les médias
indépendante et sans pub.

Déjà abonné.e ?

Voir aussi

Ne pas manquer

DÉCOUVRIR NOS FORMULES D'ABONNEMENT SANS ENGAGEMENT

(Conditions générales d'utilisation et de vente)
Pourquoi s'abonner ?
  • Accès illimité à tous nos articles, chroniques et émissions
  • Téléchargement des émissions en MP3 ou MP4
  • Partage d'un contenu à ses proches gratuitement chaque semaine
  • Vote pour choisir les contenus en accès gratuit chaque jeudi
  • Sans engagement
Devenir
Asinaute

5 € / mois
ou 50 € / an

Je m'abonne
Asinaute
Généreux

10 € / mois
ou 100 € / an

Je m'abonne
Asinaute
en galère

2 € / mois
ou 22 € / an

Je m'abonne
Abonnement
« cadeau »


50 € / an

J'offre ASI

Professionnels et collectivités, retrouvez vos offres dédiées ici

Abonnez-vous

En vous abonnant, vous contribuez à une information sur les médias indépendante et sans pub.