C'est fait ! Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, s'est offert Twitter pour 44 milliards de dollars. "L'oiseau est libéré", a-t-il tweeté comme si l'oiseau bleu, symbole du réseau social, avait passé les dix dernières années en cage. Prisonnier de qui ? De la gauche, croit savoir Musk. Aussitôt arrivé, Musk a surtout libéré à tour de bras ses nouveaux employés – en fait brutalement licenciés –, et promis de faire de Twitter une plateforme de liberté d'expression absolue. Mais de quelle liberté parle-t-on exactement ? Musk est-il un doux dingue ou un danger pour nos démocraties déjà bien fragiles ? Faut-il paniquer quand un multimilliardaire excentrique met la main sur un réseau social aussi puissant que Twitter, qui compte plus de 300 millions d'utilisateurs ? Pour tenter de comprendre les implications de ce changement majeur, Paul Aveline reçoit Élise Viniacourt, journaliste pour Libération, Olivier Tesquet, journaliste chez Télérama, et Jean Cattan, secrétaire général du Conseil national du numérique.

De "visionnaire" à danger public

En 2020, le journal de 20 h de TF1 est amoureux. Musk est un "visionnaire", un "génie", quasiment le messie qui sauvera l'Humanité de sa perte certaine. "Avec le rachat de Twitter, les gens se rendent compte qu'Elon Musk est problématique à plein d'égards. […] C'est quelqu'un qui a beaucoup de mal à respecter le droit du travail. […] On est dans une bascule dans l'image qu'on accorde au milliardaire", juge Élise Viniacourt, qui suit le dossier pour Libération.

Musk, un ingénieur eugéniste ?

Derrière ses grands discours sur la liberté d'expression, Elon Musk est aussi l'un des représentant du mouvement "long-termiste", note Olivier Tesquet, journaliste pour Télérama : "Le projet est de sauver l'humanité sur des millénaires. […] Et ça consiste à dire qu'on va plutôt sauver les gens dans les pays riches parce que c'est eux qui produisent le plus."

Un cyclone passe sur Twitter

Qui Elon Musk a-t-il licencié exactement ? Depuis le rachat, les équipes de Twitter France ne répondent plus à la presse. Ont-ils seulement encore un travail ? "C'est un peu comme quand un cyclone est passé, on est en train d'évaluer les dégâts", estime Olivier Tesquet.

Que peuvent les États face à Musk ?

Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et Thierry Breton, Commissaire européen au marché intérieur, l'assurent : Elon Musk devra respecter les lois nationales et européennes, et donc empêcher la prolifération des discours de haine sur sa plateforme. Breton est même aller serrer la pince de Musk au Texas. "Ce dialogue entre l'autorité publique et les plateformes ne doit pas se faire comme ça entre deux hommes qui discutent derrière des portes closes", juge Jean Cattan, qui milite pour que ce dialogue ait lieu avec "la société toute entière".

Pour aller plus loin

- Les enquêtes d'Élise Viniacourt sur le rachat de Twitter par Elon Musk.
- Le livre d'Olivier Tesquet : État d'urgence technologique -Comment l’économie de la surveillance tire parti de la pandémie (Premier parallèle, 2021).
- La tribune de Jean Cattan dans le Monde, appelant Elon Musk à "ouvrir Twitter".
- Le compte Mastodon d'Arrêt sur images.