19
Commentaires

Copé, ou l'art d'habiller les zigzags

"Promis, j'arrête la langue de bois". Jean-François Copé a fait cette profession de foi dans un livre sorti en 2006. Depuis, sa franchise est débridée, on ne peut plus l'arrêter. Burqa, bouclier, dette, retraite : plus aucun sujet ne lui fait peur. "On ne va pas se raconter d'histoire", "il faut savoir être pragmatique". Le candidat à la présidentielle 2017 a décidé de "parler sans tabou". Il prône la "coproduction législative" entre les députés et le gouvernement, et souhaite un "nouveau pacte majoritaire" depuis la défaite des régionales.

Derniers commentaires

Comme Carla Bruni hier soir,il nous joue du pipeau....Tous les deux nous croient amnésiques...Et puis le pipeau ça demande du talent!
Bras levé vers le haut et paume tournée vers le ciel, Jean-François Copé, sans le savoir, reprend la même main levée dessinée par Annibale Carrache il y a quelques siècles à peine de cela. Ce rapprochement serait sans intérêt si ce geste n’avait pas les résonances ancestrales de l’orant qui dépassent de loin le simple grattage d’oreille, la gesticulation médiatique ou encore la chasse aux « petits loupés ». Les petits loupés sont ces infimes repentirs qui zigzaguent dans les tracés d’une main dans lesquels le sens se cherche encore. Et par des cheminements qui m’échappent encore, j’en arrive même à faire ressurgir, des ténèbres de l’oubli, l’extrait d’une étude consacrée à Anatole France, intitulée Anatole France et la Pensée contemporaine, dans laquelle Raphaël Cor cherche à décrire l’esprit du temps :

« L’ironie, bonnement maniée, est une chose délicieuse. Elle est l’instrument le plus souple à murmurer nos sentiments intimes, nos tristesses et nos regrets les plus chers, - le voile parfois de bien des douleurs. Chez les délicats, l’ironie n’est souvent que la pudeur de la tendresse. Elle est la joie de la sagesse. Elle est un sourire ; elle est aussi un jugement, le seul jugement qui puisse convenir aux époques de civilisation raffinée et lasse, un jugement incertain et flottant qui semble douter de soi et se critiquer avec une clairvoyance agile. Elle est la forme joyeuse de l’analyse, l’ultime fleur du détachement. Elle nous délie des autres et de nous. Elle prête à nos confessions un air de raillerie qui les rend tolérables. Elle a remplacé la colère. On dirait que, fatigués de gesticulations vaines, las d’avoir pris au sérieux des êtres et des actes dont il eût mieux valu sourire, nous avons mué nos mauvaises humeurs et nos récriminations moroses en un regard bienveillant et moqueur sur tous et sur nous-mêmes. La véritable ironie commence par soi. Elle est une forme orgueilleuse de l’humilité ou, si l’on préfère, une forme humble de l’orgueil, démarche d’un esprit qui connait son néant et le néant nous aide à supporter la conscience du nôtre, ainsi récompensés de notre acte d’humilité par la joie délicate de nous sentir supérieurs à nous-mêmes, en sorte que notre modestie et notre amour-propre y trouvent également leur compte. Elle est probablement la formule suprême de nos incertitudes amusées et de cette sage défiance de soi qu’enseigne aux âmes fines le dédoublement continu. Elle est l’apaisement dans le sourire de l’indulgence. »
"Je propose qu'on change la constitution et qu'on prévoie une sorte de contrat comme le proposait Pierre Mendès-France en d'autres temps". Il propose de prévoir sur cinq ans, "la réduction des dépenses de l'Etat et de la sécurité sociale". En langage Sarkozy, ça ne s'appellerait pas la réduction du nombre de fonctionnaires, le déremboursement des médicaments, les franchises médicales et Cie ?"

...très intéressant tout ça et révolutionnaire!
Si l'on demande qu'un "programme" de la réduction des dépenses de l'état et de la sécurité sociale soit inscrit dans la constitution, il n'y aura plus de possibilité de contester les suppressions de fonctionnaires; la dimininution des moyens donnés à l'éducation, à l'hopital, à la justice ou bien aux autres réformes de destruction massive de l'état républicain.
Déjà qu'à l'heure actuelle le programme électoral du Président Sarkozy est élevé comme une vérité absolue, approuvé qui plus est par 53% des électeurs: toute contestation y est quasiment dénoncée comme anti-démocratique.
Qu'est-ce que ce sera alors!
Reste à savoir la forme de cette "programmation" qui sera votée par les électeurs. Mais je crois que l'on peut faire confiance à Jean-François et ses copains pour que les français ne comprennent l'enjeu que trop tard...
"Ah bon, pourquoi ? "Parce que s'il y a trop de dette, ce sont nos enfants qui paieront". Quel scoop ! Quelle approche novatrice ! Le coup de la dette payée par les enfants, on ne l'avait encore jamais fait."

ha oui c'est vrai ça ! c'est extrêmement original, ça bouge vraiment à l'UMP ça sent le neuf, comme dans les messages de PAT40.
« Une biographie de Copé dévoile un ambitieux sans borne » par Mathilde Mathieu, Mediapart, 12 janvier 2010 ( accès payant ) http://www.mediapart.fr/journal/france/080110/une-biographie-de-cope-devoile-un-ambitieux-sans-borne

En avril 2009, Jean-François Copé avait publié un essai, ode à «l'hyper-parlement», affublé d'un titre un peu «gentillet»: Un député, ça compte énormément. Neuf mois plus tard, ses premiers biographes, Frédéric Dumoulin (journaliste à l'AFP) et Solenn de Royer (La Croix), révèlent qu'il avait en fait envisagé de barder son livre d'un bandeau rouge, franc du collier: «Face au Président». La tentation de déclarer la guerre à Nicolas Sarkozy publiquement le titillait. Prudent, Jean-François Copé a finalement résisté. Mais pour combien de temps?

Car le chef de file des députés UMP n'a qu'un objectif: enfiler les habits de chef d'Etat. Dans leur enquête ultra-fouillée (250 personnes interrogées), Copé l'homme pressé (l'Archipel), les auteurs rapportent qu'il bassinait déjà ses «flirts» du lycée avec son ambition élyséenne; même le jour de son mariage, dans le jardin de la belle-famille au Vésinet (Yvelines), ce diplômé de l'ENA avait estomaqué son beau monde: «Vous avez de la chance, vous êtes au mariage du futur président de la République» – une vraie tête à claques.

Aujourd'hui, la seule question qui reste, avant sa déclaration de candidature, c'est: «2012 ou 2017?»... À la fin du livre, l'un de ses proches collaborateurs déroule le plan de bataille officiel: si Nicolas Sarkozy se fait réélire, Jean-François Copé prendra la présidence de l'Assemblée; s'il est battu, les rênes de l'UMP... Mais le maire de Meaux (Seine-et-Marne) travaille forcément, en coulisse, d'autres scénarii.

Ainsi, Frédéric Dumoulin et Solenn de Royer relatent cet échange révélateur entre l'élu de Meaux et Jean-Marc Ayrault (son homologue au PS), dans un couloir du Palais-Bourbon, fin 2007, au lendemain d'une émission de Canal + où Jean-François Copé dévoilait son appétit pour l'Elysée:
— «Tu veux être président?», l'interpellait le socialiste.
— «Oui, c'est décidé, je serai candidat (...). En 2017. Ou peut-être avant, s'il y a un accident...»

À 45 ans, donc, cet ancien «bébé-Chirac» (qui avait choisi le maire de Paris contre Edouard Balladur en 1995), se prépare. En rupture avec Nicolas Sarkozy depuis 2004 (après que ce dernier a fait le service minimum pour soutenir sa candidature à la tête de la région Ile-de-France), exfiltré du gouvernement en 2007, relégué à l'Assemblée, Jean-François Copé n'a qu'une stratégie: se construire dans un antagonisme au sarkozysme; et qu'une tactique: user des pouvoirs de nuisance que la réforme du Parlement lui offre depuis l'été dernier.

Au fond, il applique le conseil que Nicolas Sarkozy lui avait lancé, lors de leur toute première rencontre en 1990 (dévoilée dans le livre): «Il ne faut rien demander, il faut prendre.» «Scolaire», Jean-François Copé a retenu les leçons de son aîné (de 10 ans), qui s'était imposé en revendiquant sa «rupture» avec le chiraquisme.

«Nicolas Sarkozy a une conception médiévale des rapports humains, expose ainsi Jean-François Copé à ses biographes. Dans son schéma, il y a le suzerain, le vassal et le rival...» Humilié en 2007, l'élu de Meaux a simplement décidé de laisser à Xavier Bertrand le second rôle et opté pour la seule option qui restait...

Jusqu'ici, ça lui réussit plutôt. Jean-François Copé occupe désormais nombre de discussions à l'Elysée, où les opinions des conseillers divergent quant à sa dangerosité réelle, au point qu'ils se disputent sur la marche à suivre: l'utiliser ou le tuer? En attendant, Brice Hortefeux, son principal ami dans le clan sarkozyste, joue les «go-between» et se charge de le refroidir: «Tu te survends», lui soufflerait-il régulièrement.

Jean-François Copé, de fait, doit encore se bâtir une pensée, pour se délivrer de ses positionnements tactiques (telle sa croisade anti-burqa), qui visent essentiellement à le distinguer médiatiquement. Sur ce point, la conclusion du livre, après un an d'enquête, est sans appel: pour l'heure, «on ne peut (...) le raccrocher à aucun courant de pensée, aucune idée, aucun combat».

Mais au-delà de l'animal politique capturé dans son milieu parlementaire, la biographie de Frédéric Dumoulin et Solenn de Royer s'attache à éclairer deux autres facettes de Jean-François Copé («L'envers d'un être, c'est cet être encore», rappelle une citation de Paul Morand placée en exergue): les auteurs détaillent ainsi son parcours de «châtelain» sur ses terres de Seine-et-Marne (où il fut élu maire pour la première fois en 1995) et sa vie très secrète d'avocat grassement rémunéré par un cabinet d'affaires parisien (Gide-Loyrette-Nouel).

Méconnues, ses «manières» d'élu local (de maire qui n'habite plus à Meaux depuis 2001) s'avèrent peu reluisantes: municipalisation des associations, mise au pas des agents, chasse aux journalistes irrévérencieux de l'édition locale du Parisien... «En 14 ans, il a nettoyé la ville, déclare un conseiller municipal socialiste. C'est une ville où le contrôle politique est anormalement élevé.» Le détail qui tue? Les auteurs racontent comment, pendant longtemps, le responsable de la communication de la mairie s'est rendu à la rédaction de La Marne (concurrent local du Parisien, visiblement inféodé à Jean-François Copé), pour y viser les articles bons à paraître!

Enfin, reste le chapitre très instructif, essentiel, consacré au rapport qu'entretient le député UMP avec l'argent (intitulé «Copé et le bling-bling»). On y découvre un politique traumatisé par sa défaite aux législatives de 1997, qui l'avait laissé sur le carreau, sans revenu. Depuis, Jean-François Copé consacre une bonne part de son énergie à nourrir son train de vie.

Devenu avocat, il travaille depuis deux ans pour Gide (cabinet de haute volée, très lié à la sphère publique, qui défend Areva ou Veolia, participe à la fusion GDF-Suez, etc.), officiellement pour 3 ou 4 demi-journées par semaine et sans doute 20.000 euros d'honoraires mensuels, au risque d'un mélange des genres ou d'un conflit d'intérêts. Détail croquignolet: l'entretien d'embauche avait été organisé «sous les ors de la République», au ministère du budget, quand Jean-François Copé était encore ministre!

Mais quelles missions remplit-il précisément? «Copé n'a pas été recruté pour ses capacités techniques», déclare tout net Pierre-Raoul Duval, senior-partner aux commandes du cabinet. Dans l'intranet «maison», tous les avocats sont rattachés à un département précis, rappellent Frédéric Dumoulin et Solenn de Royer. Pas Jean-François Copé. «Il figure aux côtés de deux autres collaborateurs tout aussi inclassables», notent-ils. Sous couvert d'anonymat, un ancien avocat de Gide se lance: «Cela s'appelle du lobbying.»

Restait à dénicher un cas d'école. Les auteurs détaillent ainsi le travail d'influence – de «haute couture» – fourni par Jean-François Copé en 2009, pour aider à geler une proposition de loi déjà votée au Sénat. Ce texte, soutenu par Rachida Dati (alors au ministère de la justice), prévoyait la fusion entre les métiers d'avocat et de conseil en propriété industrielle (CPI) – une réforme qui permettait aux seconds de se passer des premiers, et risquait de faire perdre pas mal de budgets au cabinet Gide...

Selon les journalistes, Jean-François Copé en personne a décroché son téléphone pour appeler Rachida Dati et lui demander de recevoir le patron de l'Association des avocats en propriété industrielle, porteuse des intérêts de Gide notamment... Après la rencontre, la ministre n'a pas bougé. Mais en septembre 2009, Michèle Alliot-Marie (qui avait pris sa succession place Vendôme) a commencé d'émettre des réserves sur la réforme... quelques jours après avoir déjeuné avec Jean-François Copé. Depuis, la proposition de loi n'a toujours pas été mise à l'ordre du jour de l'Assemblée par le groupe UMP – son président invoquant une opposition de raison...

Pour compléter ce chapitre «bling-bling», les auteurs reviennent sur la manière dont Jean-François Copé a «coaché» son suppléant à l'Assemblée, Roger Boullonnois, après sa nomination au gouvernement en 2002. Ce dernier, plombier, a bien touché l'indemnité mensuelle qui lui revenait (comme à tous les députés), mais le «jeune» ministre aurait géré à distance l'enveloppe de «frais de mandat» de son suppléant (versée par le Palais-Bourbon pour compenser l'achat de costumes, l'essence, etc.), de même que le budget «collaborateurs», faisant embaucher sa propre femme Valérie comme assistante parlementaire. Outre un traitement ultra-confortable (plus de 6.000 euros si l'on comprend bien), Valérie Copé touchait alors un second salaire, en parallèle, pour un mi-temps dans une agence de communication parisienne, spécialisée dans... le lobbying (y compris à l'Assemblée). Rien d'illégal. Mais était-ce vraiment digne d'un futur – disons éventuel – président de la République française?
ah oui, Copé l'opportuniste

bof toujours la même veste qu'ils se piquent l'un à l'autre pour atteindre le pouvoir !
le même baratin, creux ou mensonger, et pour nous qui les subissons, au fond, seul change le porte-manteau !!

Copé, en voilà encore un qui rêvait d'être président !!

nb :euhh pourquoi voudriez-vous que l'on vous envoie des chocolats Sherlock ? vous n'en avez absolument pas besoin, allons ! cette chronique est tout à fait excellente sans aucune substance dopante...
:)
Je ne trouve même pas les mots pour décrire ce que m'inspire cette
pseudo évidence acceptée par tous les journalistes qui dit qu'on va devoir
se taper Copé comme président de la République dans quelques années.

Je veux dire, avoir le sentiment d'avoir un avenir déjà obstrué par cette
raclure alors même qu'on se dépêtre avec l'actuel président, c'est je
crois ce qu'il y a de pire pour un citoyen, et vraiment ça n'augure rien
de bon pour la suite des évènements cette sensation de non-choix...

Entendre dire Buy Birenbaum dans une Ligne J@une (désolé, je ne me
souviens plus laquelle) que ce fou proférait déjà à l'école qu'il serait un
jour président de la République, c'est aussi particulièrement rassurant.


Bon... en tous cas bon article encore une fois, merci !
zig-zags, le plus court chemin pour arriver.
Désolé Sherlock, « Déjà voté aujourd'hui » ( pour Dan) mais le coeur y est ;-)

EDIT: un petit bémol néanmoins ( qui aime bien... ), il serait bon de rappeler les différentes casquettes de Copé, version cumul des mandats/métiers, notamment dans l'affaire ( chut d'Etat Régie Publicitaire FTP )...

DÉCOUVRIR NOS FORMULES D'ABONNEMENT SANS ENGAGEMENT

(Conditions générales d'utilisation et de vente)
Pourquoi s'abonner ?
  • Accès illimité à tous nos articles, chroniques et émissions
  • Téléchargement des émissions en MP3 ou MP4
  • Partage d'un contenu à ses proches gratuitement chaque semaine
  • Vote pour choisir les contenus en accès gratuit chaque jeudi
  • Sans engagement
Devenir
Asinaute

5 € / mois
ou 50 € / an

Je m'abonne
Asinaute
Généreux

10 € / mois
ou 100 € / an

Je m'abonne
Asinaute
en galère

2 € / mois
ou 22 € / an

Je m'abonne
Abonnement
« cadeau »


50 € / an

J'offre ASI

Professionnels et collectivités, retrouvez vos offres dédiées ici

Abonnez-vous

En vous abonnant, vous contribuez à une information sur les médias indépendante et sans pub.