Je raccroche à l'instant d'avec une journaliste de l'Obs Télé, qui prépare une enquête sur les émissions de télé qui se reconvertissent sur le Net.

Donc, par exemple, nous.

Et comme d'autres confrères et consoeurs, elle me pose la question: "je suppose que vous avez beaucoup moins de pressions ici, sur le Net, qu'avant, à la télé".

Ah! Malheureuse consoeur. Je suis parti en live. C'était la question à ne pas poser. Surtout aujourd'hui.

Parce que c'est tout le contraire. Vous voulez que je vous dise? La pression, je ne l'ai jamais sentie aussi forte que maintenant. Avant, à la télé, ou encore avant, au Monde, jamais je n'avais senti une pression aussi forte sur mes épaules. Des contraintes techniques, oui, plein. Des contraintes de temps, de format, de style (ne pas dire "je", au Monde, par exemple). Et la plupart de ces contraintes, c'est vrai, se sont envolées ici. Pas d'horaire de bouclage. Pas de longueur limite. Pas de fréquence imposée. Pas (encore) d'obligation de trouver des invités intéressants et loquaces.

Mais la pression, la pression pressurante, la pression au souffle brûlant: "ne parlez pas de ci! Qu'attendez-vous pour parler de ça! Comment pouvez-vous dire du mal de Machin? " etc, je l'ai vraiment découverte, ici, depuis septembre, dans les forums du site. Jusqu'à présent, à bord des paquebots où j'ai officié, j'ai eu la chance d'en avoir été toujours préservé (même si deux fois, ça s'est tout de même mal terminé).

Ces dernières heures encore (ce qui explique que je sois un peu à cran) les pressionnautes se sont donnés à fond. Comment donc? Une note sur le radieux samedi présidentiel dans les allées de Disney? Mais ça ne nous regarde pas! On n'a pas envie de savoir. Alors donc, vous comme les autres, vous traitez ces sujets crapoteux! Pouah!

Et cette enquête sur ce site de rencontre, qui poursuit en diffamation un blog critique. Franchement quel rapport, mais quel rapport, avec la critique des médias? Et où il est, le dé-cryp-tage? Et où elle est, la plu-va-lue? Et gna-gna-gni. Et gna-gna-gna.

Je sais que je vais vous surprendre. Mais à l'instant, en répondant à la consoeur de l'Obs, je me suis surpris moi-même. Alors, je vous en fais part.

Pas d'inquiétude. D'abord, en général, avant même que j'aie eu le temps de le faire, un anti-pressionnaute répond au pressionnaute. Ah, délicieuse contibution de l'anti-pressionnaute! Comme elle est charpentée, perspicace, subtile, bienvenue, bien envoyée, celle-là! Quel arôme! Quel bouquet!

Ensuite, je regarde les signatures, ou à défaut, les adresses IP. Et il ne m'échappe pas que, disons, les deux tiers des pressions émanent d'un nombre de pressionnautes qui se comptent sur les doigts d'une main. Donc, on relativise.

Et puis, comme je l'ai déjà dit ici, on n'a pas fait tout ça, quitter les grands médias qui ne voulaient plus de nous, fonder ce site avec trois bouts de ficelle, travailler d'arrache-pied au prochain, pour subir, et encore moins céder à, des chantages au désabonnement (ils se sont d'ailleurs raréfiés). Donc, sans trop de mérite, on ne se laissera pas im-pressionner.

Pardonnez-moi, chère consoeur de l'Obs Télé, si vous me lisez, d'avoir été...un peu vif. Mais ce n'était pas le jour.