Et apparut le fantôme de Jaurès
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chronique

Et apparut le fantôme de Jaurès

Il y a du juillet 1914, dans les jours que nous traversons. Après l'invasion russe de l'Ukraine, comment vont jouer les alliances ? Comment être le grain de sable, dans l'engrenage d'une guerre générale ? Qu'une extension de la guerre puisse naître d'un mot de trop, il aura fallu que l'ex-président russe Medvedev le rappelle cruellement à l'écervelé Le Maire, pour que le ministre français fasse marche arrière, et retire ses mots de "guerre économique et financière totale à la Russie". On n'est pas encore en guerre (la preuve, Total peut continuer ses affaires en Russie), mais on n'est certainement plus en paix. Fil du rasoir.

Dans un discours à l'Assemblée, tout en reconnaissant la responsabilité exclusive du "gouvernement de M. Poutine" dans ce "crime contre l'intérêt général humain de notre temps", Mélenchon s'est opposé, au nom des nécessaires négociations et de la paix à tout prix, aux livraisons d'armes à l'Ukraine, et même à l'exclusion des banques russes de Swift. Sur Twitter, la mélenchosphère mobilise donc abondamment la référence à Jean Jaurès. Oui, tout au long de l'éprouvant mois de juillet 1914 (on peut revoir notre série d'été de 2014), Jaurès s'est battu contre la guerre jusqu'à son dernier souffle. 

"Le plus grand danger à l'heure actuelle […] est dans l'énervement qui gagne, dans l'inquiétude qui se propage, dans les impulsions subites qui naissent de la peur, de l'incertitude aiguë, de l'anxiété prolongée", écrit-il encore dans son édito de l'Huma, le 31 juillet 1914. Ce sera le dernier. Ce 31 juillet au soir, il va attaquer son texte antiguerre du lendemain, quand il est abattu au café du Croissant par le nationaliste Raoul Villain. Et, paradoxe, c'est sur son cadavre, que s'édifie les jours suivants l'Union Nationale, socialistes compris.

C'est donc apparemment à bon droit, que les Insoumis comparent Mélenchon à Jaurès. À un tout petit détail près : quand tombe Jaurès, l'agression n'est pas entamée. Aucun soldat n'a posé un pied hors de ses frontières. Aujourd'hui, Kyiv (oui, Kyiv) souffre sous les bombes de Poutine. L'agresseur a agressé. L'agressé lutte pour sa survie, comme le reconnaît Mélenchon lui-même. Personne ne sait ce qu'aurait dit et fait Jaurès vivant, le 1er août, et le 2, et le 3. C'était ma fausse note du matin. Vous avez le droit de l'estimer contradictoire avec celle d'hier.


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