Trump, Le Pen, Le Marchand : tous responsables
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Trump, Le Pen, Le Marchand : tous responsables

Commençons par le commencement. Infortunés camarades matinautes, connaissez-vous ce Monsieur ?

Vous qui avez déjà surfé sur les résumés du second débat Clinton-Trump, avez-vous vu cette image ? C'est un gars qui s'appelle Kenneth Bone, invité à questionner les deux candidats au nom des "Américains indécis", et qui a posé une question sur...devinez quoi, le changement climatique et la transition énergétique. Mais si. Pas sur la blague obscène de Trump, dans un bus, en 2005. Pas sur les conférences payées secrètes de Clinton à Goldman Sachs. Non. Sur la manière de mener la transition énergétique en préservant l'emploi. Question qui, parait-il, a fait sensation sur Twitter. Il est probable que certains Twittos se sont davantage intéressés à son pull rouge qu'à sa question, mais passons.

En fait, il est plus probable que vous ayiez vu cette image-là.

Ce sont les femmes assurant avoir été, au siècle dernier, victimes d'abus sexuels de Bill Clinton, invitées par Trump à assister au débat. Et c'est surtout la première capture choisie par le site du Monde, journal de référence français, pour illustrer le débat. Au Monde, comme au New York Times ou au Washington Post, je ne doute pas qu'on déplore hautement le niveau lamentable de la présidentielle américaine. On a écrit, on écrira, nombre d'éditos outrés sur le sujet. Mais on choisit tout de même cette photo-ci plutôt que celle-là. On aurait pu faire le choix inverse. On a toujours le choix.

Tout ceci pour dire qu'on est tous responsables du marché de l'information. Si le frelaté règne, c'est parce qu'il y a un marché du frelaté. Acteurs politiques et journalistes en sont les premiers co-responsables. Mais ce ne sont pas les seuls. Lecteurs, télespectateurs, internautes, le sont aussi. Pas autant, mais aussi. Par exemple, si vous ne voulez pas entendre parler de "la" fameuse émission de M6 à rendre sympas tous les candidats à la présidentielle française, Une ambition intime, ne lisez pas ce qui suit. Je l'ai évidemment regardée. A ma place, je suis responsable de son succès, que l'on pouvait anticiper. On a beau savoir que l'on court vers le piège, on y tombe tout de même et, oui, on se retrouve devant M6, à juger la candidate d'extrême-droite, favorite du premier tour, drôlement courageuse, tout de même, d'avoir osé virer papa. Et humaine, avec sa passion jardinage, et son enfance-attentats, et ses trois sièges bébé à l'arrière de la voiture. Mais pas seulement elle. Avant elle, trois autres héros de la vie, couturés de cicatrices, nous avaient pareillement épatés. Le Maire, Montebourg, Sarkozy : que d'enfances brimées, que de pères absents ou trop sévères, que de résiliences par le grand amour et la paternité.

Quelques jours avant l'émission, le vertueux Patrick Cohen avait reproché à l'animatrice Le Marchand de "copiner" avec Le Pen. Nul doute que Patrick Cohen, comme tout le monde, juge dégradante l'émission pipeule de M6. Mais il participe tout de même à une émission de service public qui invite Le Marchand à en faire la promo. Si je peux me permettre, il avait d'ailleurs tapé à côté. Ce n'est pas seulement scandaleux de copiner avec Marine Le Pen. A tout prendre, il est scandaleux de copiner avec n'importe quel candidat à une élection. Oui, la télé peut rendre n'importe qui sympa et émouvant. C'est incroyablement facile. Mettez Trump, ou Poutine, ou Himmler, ou Mengele, devant n'importe quelle animatrice productrice d'effets de cils et de croisement de jambes, et vous aurez envie de le cajoler comme un Pokemon. On sait comment ça marche. Après, aux dirigeants de la télé de savoir s'ils actionnent la machine, ou non. Tous responsables, je disais.

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