En Colombie, "contre toute attente"...
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En Colombie, "contre toute attente"...

"Contre toute attente", annonce le journal du matin de France Culture

, les Colombiens ont refusé par référendum l'accord de paix avec les FARC, conclu en août dernier. Invité de la Matinale, Régis Debray renchérit. Ce résultat "est une catastrophe", qui lui "donne envie de pleurer". "Contre toute attente" : quel démon irrationnel a donc saisi le peuple colombien ? Comment refuser, même d'un cheveu, à 50,21%, un accord de paix mettant fin à un demi-siècle de conflit, unanimement salué dans le monde entier, et dont la signature fut si bien mise en scène pour les télés mondiales, avec ces adversaires d'hier tout vêtus de blanc ? Les Colombiens ont-ils abusé des produits locaux ?

"Contre toute attente" donc. Mais les attentes de qui ? Pas les attentes de la droite colombienne, opposée aux accords, regroupée autour de l'ex-président Uribe, ni celle des électeurs du "non", majoritaires donc, fût-ce d'un cheveu. "Contre toute attente" désigne en fait nos attentes à nous, Européens, Américains du Nord, non-Colombiens donc, pour qui un accord de paix, vu de loin, est forcément positif, et ne requiert que l'approbation. Nous qui avons voulu nous rassurer avec ces sondages qui là-bas comme ici, ne photographient pourtant que les souhaits de leurs commanditaires, et donnaient le "Oui" vainqueur à 55%. L'expression désigne aussi les attentes de la presse internationale qui, dans ses compte-rendus de l'accord, a relégué en bas d'articles, comme dans cette dépêche de l'AFP, ou dans cette video de Franceinfo, enregistrée quelques heures avant le scrutin, l'opposition aux accords.

Dans cette opposition, multiforme, et qui reste encore à explorer, s'agglomèrent sans doute toutes sortes de mochetés et de pulsions inavouables : les souhaits de châtiments plus sévères à l'égard des FARC, et les craintes de voir leurs dirigeants s'intégrer à la vie politique (en vertu des accords, six sièges leur seront réservés dès 2018 à l'Assemblée et au Sénat colombiens). Jusqu'à se manifester dans les urnes, cette majorité était restée dans l'ombre, comme la majorité de Britanniques pro-Brexit, ou la majorité d'électeurs républicains américains pro-Trump. Dans l'ombre, ou en tout cas, hors du champ de vision de la presse internationale. Avant toute autre conclusion, il faut s'habituer à vivre avec cet aveuglement.

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