Taubira, colibri de l'état d'urgence
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Taubira, colibri de l'état d'urgence

C'est ce qu'on appelle un contrefeu. C'est au moment où Mediapart publie

une accablante enquête sur la disparition de la dénommée Christiane Taubira, ministre de la Justice présumée, sur son silence face à Cazeneuve depuis le début de l'état d'urgence et la mise entre parenthèses de la Justice, sur sa réduction au rôle d'inlassable et minuscule colibri, c'est à ce moment, donc, que ladite Taubira annonce à une radio algérienne que la mesure hollandienne de déchéance de nationalité va passer à la trappe. Façon de dire : vous voyez bien que j'existe, puisque c'est par ma voix qu'est évacuée une des mesures les plus critiquées par la gauche, la vraie gauche dont j'ai pour fonction d'être le totem muet, quoique poétisant à l'occasion, au gouvernement.

D'ailleurs, ce n'est peut-être pas un hasard. Les voix de la com' sont impénétrables. Depuis que Libé l'a annoncé hier mardi matin, de source sûre mais anonyme, le microcosme ne bruisse que de l'annonce de ce renoncement à cette mesure piquée à la droite. En l'officialisant dans la journée au micro d'une radio algérienne, Taubira aura peut-être voulu étouffer ainsi l'impact de l'enquête de Mediapart. Cela s'est déjà vu. Peut-être même, en récompense de la qualité impeccable de son silence, aura-t-elle obtenu de Valls le droit de dévoiler elle-même en avant-première cette victoire idéologique (qui n'est finalement pas une victoire, le gouvernement ayant in extremis décidé de maintenir la mesure de déchéance de la nationalité pour les bi-nationaux, même nés en France, dans le projet de révision constitutionnelle, mise à jour 23 décembre, 12 h 30).

Et sur le fond ? Six semaines après le début, le bilan des perquisitions est maigre : d'après le bilan de l'Assemblée Nationale, un beau bilan par ailleurs tout plein de données géographiques détaillées et totalement inutiles, près de 3 000 perquisitions n'auront mené qu'à 51 incarcérations, la plupart pour trafic de drogue, d'armes, ou situations irrégulières (combien de trafic de drogue ? Combien de trafic d'armes ? Combien de situations irrégulières ? Le bilan ne le précise hélas pas) et, selon Mediapart et Le Monde, deux enquêtes préliminaires par la section antiterroriste du parquet de Paris. Toute cette gesticulation de perquisitions et d'assignations à résidence est ainsi ramenée à sa vraie nature, comme le disait l'autre jour sur notre plateau Laurent Borredon, le journaliste du Monde qui anime un fort utile observatoire de l'état d'urgence : une gesticulation. Et Taubira, dans l'affaire ? Elle n'est pas inactive. Elle devrait proposer un projet de loi autorisant, hors état d'urgence, les perquisitions de nuit. Mais cette fois, attention, sous le contrôle de la Justice. Ce que le colibri de la place Vendôme pourra twitter, par exemple, ainsi : "c'est au coeur de la nuit qu'ils ont sonné chez moi. Mais le procureur avait signé le mandat. Et le soleil, soudain, brilla".




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