De l'exhibition du Modiano au 20 Heures
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De l'exhibition du Modiano au 20 Heures

Cocorico ! La littérature française est championne du Nobel, quinze prix au total

, dont Pujadas fait défiler les plus illustres : Gide, Camus, Sartre (photos), "sans oublier Saint John Perse et Claude Simon" (pas de photos). Le Modiano que reçoit le présentateur en toute fin de journal, après la fausse alerte Ebola dans le Val d'Oise, après le recul sur l'écotaxe, ce n'est donc pas l'écrivain, ce n'est même pas exactement le Nobel, c'est le champion français, la médaille d'or encore essoufflée de sa performance. Pour un peu, il aurait fait appel à Nelson Monfort, pour traduire les réponses.

Car voilà, il y a un invité surprise : les légendaires "blancs" de l'écrivain, ses délicieux bafouillements, traduction verbale de son errance inspirée. Pujadas les connait. Comme tout le monde il a le souvenir des émissions de Pivot, il sait qu'il va devoir les gérer avec souplesse et fermeté. On peut certes laisser divaguer un peu le bestiau dans les trois minutes imparties, c'est la fin du journal et un peu de zapping ne sera pas dramatique, mais tout de même. L'exercice d'exhibition de l'humble génie solitaire et vaguement foutraque est donc balisé par une sorte de clôture électrique à faible voltage.

"Est-ce que c'est un jour de grand bonheur pour vous ce Nobel ?" "Oui c'est à dire que ça a a d'abord été une surprise, je ne m'y attendais pas du tout. Voilà tout se remet en place on s'acc...et ça vous..." Première décharge pujadienne : "On réalise. Est-ce que c'est un aboutissement ?" "Oui on réalise. Euh. Ben c'est à dire un aboutissement, c'est à dire, parce que vous savez que vous allez, euh, peut-être encore continuer d'écrire, tout ça, mais c'est, euh, une sorte d'encouragement parce que l'écriture est une activité tellement solitaire qu'on finit par ne plus, euh (...) Comme un somnanbule qu'on réveille et qui s'aperçoit quand même que, oui, quand même, oui, que vous communiquez quelque chose et..." Deuxième décharge :"...Vous êtes le Proust d'aujourd'hui..." "...et pas simplement..." , "...a dit l'Académie Nobel, ça vous touche ?" "...Oui, enfin ça me touche beaucoup, mais en fait je sais pas, euh, j'ai jamais, oui ça me touche, mais..." Mais non. C'est déjà fini. Il est temps d'amorcer le chemin de l'étable : "Pardon d'être un peu matériel, mais le prix est doté de 880 000 euros, votre vie va changer ?" "Euh c'est à dire que oui évidemment, vous voyez un peu les choses s'éclaircir, mais en fait c'est toujours le même, euh, il faut continuer à écrire, c'est toujours le même problème qui se pose quand il faut commencer un livre, la vie continue..." "Merci beaucoup Patrick Modiano, et encore bravo pour ce prix Nobel". Il ne s'agissait pas de l'interroger, mais de le donner à voir, de faire entendre pour confirmation au grand public rêveur du Salon de la Littérature le légendaire meuglement mélancolique. Contrat rempli.

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