Guardian : un article sur Nestlé et l'esclavage... sponsorisé par un concurrent
Brève

Guardian : un article sur Nestlé et l'esclavage... sponsorisé par un concurrent

Un article sur la position ambiguë de Nestlé vis-à-vis de l’esclavage, "sponsorisé" par un concurrent direct de Nestlé ?

L’article du Guardian pouvait sembler à première vue plutôt favorable à l’initiative de Nestlé, consistant à prendre les devants en annonçant que l’entreprise avait trouvé des cas de travail forcé dans sa chaîne d’approvisionnement de fruits de mer en Thaïlande. Une décision, précédée d’une enquête d’un an de la multinationale suisse, par ailleurs saluée par de nombreux médias et ONG, souligne ainsi le quotidien britannique.

Mais, à raison, le Guardian souligne aussi que la dénonciation de l'esclavage par Nestlé relevait sans doute davantage de la communication que de la véritable introspection : "C’est facile de reconnaître quelque chose qui a déjà été dévoilé, rappelle le patron de l’ONG Freedom Fund, Nick Grono, cité par le journal. Au moment où Nestlé a assumé l'existence d’esclavage dans l’industrie des fruits de mer thai, c’était déjà un fait reconnu. Ce sera un vrai changement quand les entreprises enquêteront vraiment sur des parties de leur chaîne d’approvisionnement qui demeurent en dehors de la vue du public". Le quotidien dénonce d'ailleurs le paradoxe de la position de Nestlé : l’entreprise suisse se défend toujours de toute responsabilité "dans l’utilisation d’enfants esclaves pour [sa] production de cacao en Côte d’Ivoire". "Ce qui met Nestlé dans la position inconfortable de dénoncer l’esclavage pour une partie de ses opérations, pendant que dans le même temps elle combat les accusations que l’esclavage existe dans une autre partie – plus rentable – de ses activités".

"Nestlé admet l'esclavage en Thailande tout en combattant les accusations dans un procès sur le travail d'enfants en Côte d'Ivoire" - À gauche, la mention "Supported by Mondelez International". À droite, une bannière de pub "traditionnelle" pour la campagne sur le "bien être du monde" de Mondelez - Capture d'écran Theguardian.com

"La marque peut avoir un rôle dans la suggestion du sujet"

Problème : outre les encadrés publicitaires autour du contenu, un encadré situé en haut à gauche de l'article précise qu'il est "soutenu par" la multinationale Mondelez International, nouveau nom de la branche internationale de Kraft Foods (Milka, LU, Oreo etc.), deuxième acteur mondial de l’agroalimentaire… juste derrière Nestlé. Alors que veut dire ce "Soutenu par" ("Supported by" dans le texte) ? Contrairement à d’autres sites, le Guardian explique clairement ce qu’il désigne, sur une page dédiée. Le terme est utilisé par le quotidien pour "décrire un contenu indépendant éditorialement" mais où "la marque [qui] apparait dans le contenu peut avoir un rôle dans la suggestion du sujet traité" détaille ainsi le Guardian, qui assure par ailleurs que le contenu est bien rédigé par ses journalistes (principe même du native advertising) et que la marque n’a pas le droit de relire le papier avant publication.

Si selon les propres règles du Guardian, Mondelez n’avait pas le "contrôle éditorial" final sur le papier, qui a bien été rédigé par une journaliste du quotidien, il est possible que le géant agroalimentaire ait "suggéré" le sujet sur Nestlé et l’esclavage. Sans doute parce que comme le dit l’attaque de l'article elle-même : "Il est difficile d’imaginer un problème avec lequel vous auriez moins envie de voir votre entreprise associée que l’esclavage moderne."

Ou comment le Guardian et Mondelez ont inventé le concept de "campagne négative sponsorisée" ? Interrogé sur la question, le géant de l'agroalimentaire s’en défend, expliquant qu’il n’a pas de "contrôle éditorial" sur les contenus et qu’il sponsorise toute la rubrique "Chaîne d’approvisionnement durable" du Guardian, et pas seulement cet article. Mais le communiqué de Mondelez ne précise en revanche pas si c’est la marque ou non qui a "suggéré" le sujet, comme les règles du quotidien l’y autorisent.

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