Dassault n'aime pas la dette (mais les subventions, si)
Brève

Dassault n'aime pas la dette (mais les subventions, si)

Dans un long texte paru sur le site de son propre journal, Serge Dassault, cinquième fortune de France et propriétaire du Figaro, formule des "vœux" très politiques. Au détour de son plaidoyer pour une France plus libérale, l'industriel pourfend la dette et le déficit budgétaire. En oubliant de dire que la dépense publique lui profite parfois, comme lorsqu'elle vise à subventionner Le Figaro - journal qui reçoit le plus d'aides financières de la part de l'État français.

Vœux ou appel du pied aux futurs candidats à présidentielle ? Dans un long texte publié le 1er janvier sur le site du Figaro, Serge Dassault souhaite, en une phrase, "une bonne et heureuse année 2016" à ses lecteurs... et y ajoute dix-neuf paragraphes d'un programme politique dont il espère qu'un "ou plusieurs" candidats à la présidentielle s'empareront.

Après s'être prononcé pour la prolongation de l'état d'urgence, pour la déchéance de nationalité (mesure "qui ne choque que les esprits aveuglés par l'idéologie") et estimé qu'il fallait "accept[er] de restreindre certaines de nos libertés afin de garantir notre sécurité", Dassault consacre la plus grande partie de son texte à défendre une idée : la France devrait appliquer une politique économique plus libérale.

Le patron du Figaro pourfend ainsi "l'égalitarisme socialiste", et développe un long plaidoyer pour les inégalités de revenus : "Un pays, une société, a besoin pour vivre de toutes ses composantes. Il faut des riches et des moins riches, des patrons et des salariés, des financiers, des ingénieurs, des commerçants, des agriculteurs, des avocats, des médecins,etc.", rappelle l'homme qui est à la tête de la cinquième fortune de France. Il s'exprime également en faveur d'un retour à la retraite à 65 ans, et contre la liberté syndicale : "Chaque entreprise doit pouvoir décider de ses horaires avec ses salariés, en fonction de son carnet de commandes (les heures supplémentaires intervenant après 39heures), sans que les syndicats politisés puissent s'y opposer."

Contre la dette, sauf si les dépenses publiques servent à acheter des Rafales ?

Mais l'un des passages les plus intéressants de la tribune du milliardaire concerne la dette. "Quant à notre dette, nourrie par un déficit budgétaire galopant, elle a augmenté de 71milliards cette année et dépasse maintenant les 2100milliards, soit 97,6% du PIB. Et ce n'est pas demain que cela va s'arranger! (...) C'est dire, après quarante années d'impéritie budgétaire imputable à la droite comme à la gauche (le dernier budget en équilibre remonte à 1974!), dans quel état de catastrophe nationale nous nous trouvons... (...) Voilà où mène le manque de courage et de lucidité !"

Serge Dassault oublie de rappeler qu'en certaines occasions, la dépense publique est utile à ses intérêts. D'abord, l'industriel ne précise pas quelle part de cette dette est imputable à des dépenses publiques dans le domaine de la défense, qu'il connaît bien : en 2015, la mission "Défense" était la quatrième politique publique la plus coûteuse en ressources étatiques.

Dassault omet ensuite de dire que s'il n'aime pas la dette, il n'est pas contre les subventions (ainsi que le rappellent de manière grinçante certains twittos). Cela fait en effet deux ans de suite (en 2013 puis 2014) que Le Figaro est classé premier de la liste des publications qui reçoivent le plus d'aides financières de l'État français.

200 titres de presse les plus aidés par l'État français en 2013

200 titres de presse les plus aidés par l'État français en 2014

Mais peut-être le patron du groupe Dassault compte-t-il augmenter les heures de travail des salariés du Figaro, baisser leurs salaires (pour qu'il y ait "des riches et des moins riches") et faire taire les "syndicats politisés" qui s'y opposeraient pour, enfin, pouvoir renoncer à ces aides de l'État ?

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