Figaro/marathon : publicité déguisée pour Asics par un rédacteur en chef ?
Brève

Figaro/marathon : publicité déguisée pour Asics par un rédacteur en chef ?

Un "Rastignac version running" qui mettrait un peu trop en avant ses "Asics Gel-Kayano" ?

Dans son édition du 6 novembre, Le Figaro Magazine a consacré pas moins de onze pages au marathon d’un de ses rédacteurs en chef, Guillaume Tabard, rapportait PureMédias vendredi. Selon les propres termes du Figaro, Tabard nous fait donc "partager ses émotions, de l’euphorie du départ à la délivrance finale en passant par ses heures de souffrance et de fierté mêlées". Avec force détails, puisqu'il ne nous épargne aucun problème logistique : "Ah, ces dix semaines d’entraînement! Où il faut se battre avec son agenda autant qu’avec son corps. Quand caser les séances? Le matin avant le petit déjeuner, à midi à la place du ­déjeuner ou le soir après le dîner. Sous le soleil au zénith ou la nuit dans le froid. Dégoulinant de sueur ou trempé par la pluie."

Le reportage n'a toutefois pas beaucoup plu à la Société des Journalistes (SDJ) du journal. Dans un communiqué interne, celle-ci a demandé à sa direction "plus de mesure dans la mise en avant de tel ou tel collaborateur" et de veiller à ne pas trop distordre la hiérarchie de l’information.

La direction a "promis de mentionner les chaussures" (Canard)

L’histoire aurait pu en rester là. Mais dans son édition du 11 novembre, Le Canard Enchaîné révèle que le voyage et l’hébergement du "Rastignac du running" ont été payés… par la marque Asics, équipementier sportif spécialiste des chaussures de course. En contrepartie, la marque devait figurer dans le reportage. Selon l’hebdo, une attachée de presse d’Asics serait ainsi venue dans les locaux du Figaro, et la direction du journal lui aurait promis de mentionner les chaussures dans le corps de l’article, mais "pas dans le titre ni dans le chapeau". En d’autres termes, Le Figaro, en plus de faire la promotion d’un membre de son équipe, se serait rendu coupable de publicité déguisée, puisqu’aucune mention du caractère promotionnel ne figure dans le magazine (pratique interdite par la loi).

Interrogé par Le Canard, Tabard réfute toutefois le qualificatif de publirédactionnel : "L’angle de ce reportage, c’était le vécu du marathon de New York par un coureur lambda, pas Asics. Est-ce que j’ai traité le sujet de manière honnête et rigoureuse? Je pense que oui. Je n’ai pas l’impression d’avoir été embedded ["embarqués", ndlr] par Asics." Contacté par Buzzfeed, il concède simplement qu’il s’agit d’un "voyage de presse" : "Je sais qu’un contact avait été pris avec le journal et la marque six semaines avant le marathon, mais c’est un voyage de presse, pas un publireportage." Comprendre : Asics a payé "tous les frais du journaliste et du photographe", comme l'a reconnu la direction du Figaro, mais n'aurait rémunéré directement ni le journaliste ni le journal. Et à combien se chiffrent ces fameux frais, dont une belle chambre d'hôtel dans Manhattan visible sur l'une des photos ? Le rédacteur en chef du journal a refusé de répondre à la question de Buzzfeed.

"Dans sa chambre d'hotel, la veille du départ. Devant lui, ses précieuses chaussures de course Asics. Ce sont elles qui le porteront demain vers la ligne d'arrivée."

Alors voyage de presse un peu trop complaisant ou véritable publicité déguisée ? Le ton de l’article (et les cinq photos où l’on peut voir les chaussures, dont une en gros plan) montre au minimum que la frontière est mince : "Les seules compagnes constantes du coureur sont cependant… ses chaussures. Combien d’heures passées avec elles ? […] Qui veut comprendre le marathonien dans ses pompes et dans ses œuvres doit saisir ce lien particulier. Le jour où l’on a troqué la vieille basket qui traînait pour une vraie chaussure de course. Celui où l’on a acheté sa première paire d’Asics, des Rolls aux pieds. Celui où l’on s’est mis à comparer les vertus de chaque modèle. Autant d’étapes initiatiques où l’on s’est senti chaque fois un peu plus membre de la tribu, un peu plus professionnel. "A vous de jouer", dis-je intérieurement à mes Gel-Kayano." Car l’éditorialiste du Figaro ne parle pas à n’importe quelles chaussures. Il parle à son modèle Gel-Kayano® vendues 140€ par Asics™, disponibles dans vos points de vente habituels.

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