Plan anti-évasion fiscale : Le Monde ignore la déception des ONG
Brève

Plan anti-évasion fiscale : Le Monde ignore la déception des ONG

La fin de la récréation fiscale ? Hier, l’OCDE – à travers la voix de son directeur Pascal Saint-Amans – a annoncé son plan pour lutter contre l’évasion fiscale des multinationales. Ce plan a été salué par de nombreux médias… lesquels soulignent également la déception formulée par les ONG – dont CCFD-Terre solidaire – qui considèrent que rien n’est réglé. Cette déception est reprise par tous les médias – y compris l’AFP – excepté Le Monde. Un problème de timing explique la journaliste du quotidien Anne Michel qui assure préparer un papier d’analyse d’ici les prochains jours.

Youpi l’évasion fiscale c’est fini ? A en croire Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE, voici venue "la fin de la récréation" de l’évasion fiscale. En effet, après deux ans de travaux – racontés sur notre plateau par Saint-Amans en compagnie de Pascal Canfin, ancien eurodéputé EELV et ex-ministre du développement et de Lucie Watrinet, chargée de plaidoyer pour CCFD-Terre Solidaire – l’OCDE a réussi à mettre sur pied un plan de 15 actions qui seront entérinées formellement par les ministres des finances du G20 au Pérou le 9 octobre.

Que propose ce plan ? Selon Le Parisien, "les Etats du G20 et de l'OCDE promettent, entre autres, de limiter la déductibilité des intérêts, d'encadrer les niches liées aux brevets (patent boxes), et de s'informer mutuellement des régimes fiscaux préférentiels de certaines sociétés (rescrits fiscaux ou tax rulings en anglais)". Mais encore ? "Les multinationales réalisant au moins 750 millions d'euros de chiffre d'affaires devront détailler leurs activités pays par pays, et ces informations seront partagées par les administrations fiscales". Un plan qui réjouit évidemment Saint-Amans. Dans Le Figaro, le directeur de l’OCDE se félicite "d'un accord ambitieux" : "nous avons accompli un travail herculéen en deux ans, insiste-t-il. Nous changeons d'ère. C'est la fin de la planification débridée, le retour au bon sens où la baisse des impôts ne peut être le cœur du business model."

Pour autant, les titres de presse qui relaient ce grand plan d’action – dont Le Figaro ou Le Parisien cités plus haut mais aussi Libération, Les Echos et même la dépêche AFP reprise par Le Point ou La Croix– ne manquent pas de rapporter la déception des ONG, et notamment celle de Watrinet qui estime ce plan nettement insuffisant : "si les pays de l’OCDE avaient vraiment voulu réformer le système fiscal international, dit-elle, ils auraient examiné plus en profondeur les méthodes qui visent à répartir entre les différents pays les bénéfices des multinationales en fonction de l’activité réelle de ces dernières. Au lieu de cela, les propositions ambitieuses ont été remises à plus tard et l’OCDE propose aujourd’hui des aménagements flous et complexes de règles vieilles de plus d’un siècle".

Cette réaction de déception, formulée par les organisations de la Plateforme Paradis fiscaux et judiciaires, dont CCFD-Terre solidaire est coordinatrice, a été envoyée à la presse dès vendredi dernier. Ces dernières étaient sous embargo jusqu’à lundi 14 heures, tout comme l’annonce du plan de l’OCDE, lui aussi sous embargo jusqu’à lundi après-midi.

Une déception relayée par tous donc… sauf par Le Monde. L’article applaudit des deux mains le plan de l’OCDE, "consensus [qui] relève d’un tour de force, tant la question de l’évasion fiscale des entreprises se heurte à des intérêts économiques divergents, entre pays lésés et pays bénéficiaires d’un business fiscal qui emploie des bataillons de banques et d’avocats". Un consensus… moins ambitieux que prévu selon les ONG ? Vous n’en saurez rien à la lecture du Monde. Interrogée par @si, Anne Michel, la journaliste du Monde et auteure de l’article, se défend d’avoir voulu occulter le point de vue des associations, et avance un problème de timing : si elle était en possession de toutes les informations dès vendredi, elle explique ne pas avoir pu vérifier que les associations... avaient bien eu connaissance du plan de l'OCDE, auquel elles ont réagi : "je ne pouvais pas relayer les réserves des ONG qui n’étaient pas censées avoir pris connaissance d’un rapport publié le jour-même" explique-t-elle. Michel assure travailler actuellement sur un article plus approfondi – avec les réserves des uns et des autres, promet-elle.

> L'occasion de voir ou revoir notre émission "Evasion fiscale : avec Juncker, il faut faire du judo !"

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