Madame Figaro et le "stagiaire roi" : "bashing anti-jeunes" ?
Brève

Madame Figaro et le "stagiaire roi" : "bashing anti-jeunes" ?

Le site de Madame Figaro aurait-il publié un poisson d’avril un peu en retard ? Dans un long billet d’humeur publié ce jeudi, la journaliste Marion Galy-Ramounot s'agace de ce qu’elle appelle le "stagiaire roi", ce "monstre de la génération Y". Un article qui a du mal à passer sur les réseaux sociaux.

Article de Madame Figaro, 2 avril 2015

Qu’êtes-vous ? Un "carriériste pervers" ? Un "premier de la classe" ? Ou bien simplement un malheureux "stagiaire de 3ème" qui "suit balourdement son maître de stage à la trace" ? En tout cas, si vous êtes nés entre 1980 et 2000, et donc faites partie de la "génération Y", vous faites probablement un très mauvais stagiaire. C’est du moins l’opinion de la journaliste Culture & People Marion Galy-Ramounot, qui livre son point de vue dans un article publié jeudi 2 avril sur le site de Madame Figaro et intitulé "Le stagiaire roi : ce monstre de la génération Y".

Pour illustrer l'article, une photo de Jesse Eisenberg,
qui jouait le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg dans The Social Network
(Source : site de Madame Figaro)

Comment est-il, le stagiaire ? Il est "insolent, méprisant, familier, insubordonné, blasé" et un jour, deviendra un "gourou" pour son équipe de travail. C’est un "stagiaire diva", qui se met pieds nus dans la rédaction, arrive en retard pour cause de "gueule de bois". Et quand il n'est pas en train de "rigole[r] aux blagues qu’il ne comprend pas" (car il veut se faire bien voir en tant que "premier de la classe"), il "vous regarde d’un air entendu quand vous enguirlandez un autre stagiaire", parce qu’il est carriériste. Tout ça pour dire que le stagiaire "vous domine" et qu’on regrette le temps où un stagiaire, ça "faisait le tri dans votre courrier avant de sucrer précautionneusement votre café noisette".

Surenchère ironique des Inrocks

Libération n’a guère goûté au papier de Madame Figaro. La journaliste de Libé Johanna Luyssen critique le "ton volontairement enlevé et sociologique façon « typologie de la vie du bureau »", qui dresse un portrait "peu réaliste des stagiaires". Au final, cet article pourrait bien cacher "une certaine angoisse générationnelle devant l’agilité numérique des 15-30 ans", conclut la journaliste, qui y voit un exemple de "bashing anti-jeunes" déjà apparu avec la polémique sur la chanson des Enfoirés Toute la vie.

Quant aux Inrocks, ils se lancent dans une surenchère ironique face à ce "mal rampant" qu'est le "nouveau gangster de l'open-space". "C'est vrai", conclut le journaliste : "qui n'a pas envie d'avoir pour seul horizon des portes qui se ferment, un refus quasi-systématique d'embauches après s'être fait exploiter ?".

Si l’intention était de faire un article drôle, le résultat n’est donc, de l’avis de certains, pas très réussi. Sur Twitter, en tout cas, les réactions négatives ont été légion. Le mot-clé #MaVieEnStage, utilisé par les stagiaires pour raconter anecdotes et blagues, se plaindre ou se réjouir de leurs expériences, a été détourné par certains pour manifester leur agacement. Le mot-clé a atteint jeudi dans l’après-midi la troisième place des "tendances France" de Twitter, qui recense les mots-clés les plus utilisés sur le réseau social.

Un blog Tumblr ironiquement nommé "Stagiaire roi" a été créé dans la foulée de la parution de l’article, où quelques messages bourrés de fautes d’orthographe – pour singer le "langage jeune" – caricaturent l’article de Galy-Ramounot.

"Quand on me demande de finir mon joint dehors"

Un "papier d'humeur", fait pour caricaturer

Et si c’était du second degré ? Contactée par le site de Metro News, la rédactrice en chef de Madame Figaro Cécilia Gabizon défend l’article, le décrivant comme un "papier d’humeur" rédigé par une journaliste de "moins de trente ans" pour "caricaturer ce personnage du « stagiaire roi»" et qui ne visait pas les "stagiaires en général".

Sérieux ou humoristique, Madame Figaro tranche en tout cas avec le ton adopté par Le Monde sur le même sujet : mardi, le quotidien du soir publiait en effet un très sérieux papier relayant des témoignages de stagiaires dont les expériences en entreprise se sont mal passées, notamment parce que le travail demandé n’était pas à la hauteur de la formation de ces étudiants. Une expérience bien loin de celle du stagiaire roi qui ne demande qu’à "glander".

(Par Juliette Gramaglia)

L'occasion de (re)voir notre émission : "Enfoirés: «La société n'aspire pas à faire un pont d'or à la jeunesse»", où nous invitions notamment Julien Bayou, co-fondateur du collectif de défense des stagiaires "Génération précaire".

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