Le charme discret des pelotons d'exécution
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Le charme discret des pelotons d'exécution

Le gouverneur de l'Utah (États-Unis) a signé lundi dernier une loi permettant d'exécuter les condamnés à mort avec un bon vieux peloton de gugusses armés de fusils. On n'arrête pas le progrès.

Dispositif d'exécution par arme à feu
dans la prison de Daper, Utah, USA
Photo © Trent Nelson/AP


Cette exécution à coups de flingues est toutefois soumise à une condition : que les produits létaux ordinairement utilisés ne soient pas disponibles trente jours avant l'application de la sentence. Laquelle risque fort d'être remplie, car les États amerlocains pratiquant la peine de mort ne peuvent plus, suite à une interdiction d'exportation prononcée par l'Union européenne en 2011, se procurer en Europe du thiopental sodique, l'un des trois éléments couramment utilisés pour pratiquer une injection létale (la seule entreprise américaine qui en fabriquait cessa d'en produire en 2010).

L'interdiction énoncée par l'Union européenne était une manière de forcer les États-Unis à abandonner la peine de mort. Et de fait, privés du précieux produit, les États du Connecticut, de l'Illinois, du New Jersey, du Nouveau-Mexique, du Maryland et de New York l'ont abandonnée. La Floride, le Texas, le Missouri, la Georgie et l'Oklahoma, en revanche, ont eu recours à des produits de substitution - non testés - commandés à des laboratoires pharmaceutiques locaux couverts par l'anonymat. C'est ainsi qu'en Oklahoma, l'exécution de Clayton Lockett pratiquée en avril 2014 avec des produits peu fiables dura quarante-trois minutes. En juillet de la même année et en Arizona, celle de Jospeh Wood dura, pour les mêmes raisons, une heure et cinquante-huit minutes. Ces deux affaires firent scandale.

En Utah, les personnes condamnées avant 2004 avaient le choix entre l'injection létale et le peloton d'exécution. La dernière personne qui choisit la seconde solution fut passée par les armes en 2010. Aujourd'hui, donc, pour ne plus avoir à courir après des produits létaux difficiles à se procurer, l'Utah a rétabli ledit peloton. Parce que des cartouches et des fusils, on en trouve partout aux États-Unis. La tradition, ça a du bon. Surtout avec une chaise en plus (non branchée sur le secteur).

 

Profitons-en pour contempler quelques pelotons d'exécution célèbres.

Le 2 mai 1808, les Madrilènes se soulevèrent contre l'occupant français. Le lendemain, nos braves pioupious exécutaient en représailles une brochette de prisonniers ibères. Goya immortalisa six ans plus tard cet assassinat, avec une toile intitulée Tres de Mayo (Le 3 mai) :


Le 19 juin 1867, Maximilien de Habsbourg-Lorraine, bombardé empereur du Mexique par Napoléon III puis lâché par le même, était exécuté par des républicains mexicains. Édouard Manet fixa cet événement en 1868. Dans sa peinture, qui fait référence à celle de Goya, les Mexicains portent des uniformes français. C'était là, pour Manet, une manière de dire que Napoléon III (auquel le soldat rechargeant son fusil à l'extrême droite ressemble furieusement) avait assassiné Maximilien en l'abandonnant à son sort :


Le 18 mars 1871 les Communards dessoudaient à Montmartre les généraux versaillais Clément Tomas et Jules Lecomte. Ernest-Eugène Appert en fit une photo, qui n'est en vérité qu'une mise en scène doublée d'un montage : le photographe, qui n'assista pas à l'exécution, fit poser des figurants et dessina le peloton ; quant aux généraux, ils furent découpés puis collés contre le mur :

 

En 1957 sortaient Les sentiers de la gloire de Stanley Kubrick. Trois soldats français de la Première Guerre mondiale, soi-disant coupables de lâcheté devant l'ennemi, y sont fusillés. Ils furent environ un millier à être exécutés ainsi, "pour l'exemple" :


Terminons sur une pointe de rigolade amère avec ce sketch issu des Monstres de Dino Risi, intitulé On oublie vite. On y découvrira un discret quoique élégant petit pan de mur gris :

On oublie vite,
sketch extrait des Monstres de Dino Risi, 1963

 

 

L'occasion de lire ma chronique intitulée De l'épaisseur des murs.

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