Les Inrocks le rapportent dans leur Buzzodrome (où ils regroupent quotidiennement les nouvelles les plus diffusées) : "Un ex-ministre pakistanais offre 200 000 dollars à celui qui tuera le propriétaire de Charlie Hebdo". Qui est cet ex-ministre, et dans quelles circonstances a-t-il appelé au meurtre ? Ghulam Ahmed Bilour, ex-ministre des Chemins de fer, a fait cette déclaration devant l'Assemblée nationale pakistanaise. Il est en effet député du Parti National Awami (ANP), un parti populaire parmi la minorité pachtoune, et qui affirmait dans un manifeste publié à l'occasion des élections de 2013 : "L'ANP croit fermement dans la paix et la non-violence, et s'élève contre l'extrémisme et la violence sous toutes leurs formes" et "s'oppose aux interprétations étroites de la religion et des coutumes".

Capture de la page Facebook de l'ANP

Si son parti se revendique "pacifiste" et "laïc", Ghulam Ahmed Bilour lui-même est plutôt connu pour ses appels à la violence au nom de l'islam. En 2012, le député, issu d'une riche famille de commerçants, avait déjà annoncé qu'il offrirait 100 000 dollars à qui tuerait le réalisateur de L’Innocence des Musulmans, ce film dépeignant le prophète Mahomet comme un obsédé sexuel assoiffé de sang, dont la diffusion de la bande annonce sur Youtube avait embrasé le monde musulman et abouti à l'assassinat de l'ambassadeur américain en Libye.

Cette fois-ci, Bilour a pris la parole lors d'un débat parlementaire à propos de l'attentat visant une mosquée chiite qui a fait au moins 60 morts à Shikarpur, au sud du Pakistan, vendredi. Alors que la majorité des députés pakistanais condamnait le terrorisme et déplorait "l'attitude insensible" du Premier ministre après l'attaque (menée par un groupe proche des Taliban), Bilour est intervenu pour évoquer la tuerie à Charlie Hebdo.

Le quotidien pakistanais anglophone Dawn :
"Le coup de pub de Bilour : une récompense pour les héritiers des auteurs de l'attaque à Charlie Hebdo"

Le quotidien anglophone pakistanais Dawn raconte comment Ghulam Ahmed Bilour "a saisi l'occasion pour mettre en scène ce qui ressemble à un coup de pub personnel", en annoncant qu'il était prêt à verser la récompense de 100 000 dollars, proposée en 2012 à qui tuerait le réalisation de l'Innocence des musulmans, aux héritiers des auteurs des tueries de Charlie Hebdo et du supermarché casher de la Porte de Vincennes. Après cela, il a ajouté qu'il "était également prêt à verser 200 000 dollars supplémentaires à qui achèverait le propriétaire de Charlie Hebdo", d'après le Dawn (qui ne cite pas directement le député mais rapporte ses propos au style indirect).

Toujours d'après le quotidien pakistanais, personne au sein de l'Assemblée n'a réagi à ces déclarations– que ce soit pour les soutenir ou pour les condamner. Dawn rappelle que le député, dont le fils unique a été tué lors d'élections (dans des circonstances non élucidées), puis le frère assassiné par les Taliban, est "connu pour être imprévisible".