« Un dessinateur lâche », dit le titre.
« Le cul poilu de Mohammed ! », est-il écrit au bas du dessin tenu par Crumb.
« Eh Eh ! Je plaisante ! En fait, c'est le cul de mon pote Mohammed Bakshi,
un producteur de films qui vit à Los Angeles, Californie »,
précise le dessinateur qui signe
« R. Crumb, montrant sa solidarité avec ses camarades martyrs,
8 janvier 2015 ».

Le New York Observer a interviouvé Crumb vendredi dernier. Ce journal, relativement confidentiel, est le seul organe de presse américain ayant pensé à questionner l'un des plus célèbres dessinateurs étazuniens, qui a en outre la particularité de vivre en France depuis 1991.

Dans cette entrevue, Crumb explique à la journaliste new-yorkaise, qui lui demande pourquoi les caricaturistes français ont « besoin d'être si méchants », la tradition française du dessin satirique. Il évoque également celui qu'il a réalisé pour Libération, parle de son hésitation quant à la chose à dessiner, sûrement pas une image montrant les morts telle celle-ci, très brillante, qui a fait le tour du monde :

Dessin de David Pope
Le texte est un jeu de mots à trois étages :
« He drew first » signifie Il a dessiné le premier
mais aussi Il a dégainé le premier, Il a tiré le premier.

Il voulait faire quelque chose de très personnel, très original, et cette idée lui a traversé l'esprit : « Je suis un dessinateur lâche (…). Aussi, au lieu de dessiner le visage de Mahomet, je vais dessiner ses fesses ! Et je me suis représenté, disant "En fait, c'est le cul de mon pote Mohammed Bakshi, un producteur de films qui vit à Los Angeles, Californie". » (Crumb fait là un gag, un clin d'oeil à Ralph Bakshi, qui a réalisé le dessin animé Fritz the Cat d'après sa bd du même nom.)

Il raconte la réaction de son épouse, « Oh mon Dieu ! Nous allons devoir nous cacher ! », laquelle a aussitôt eu l'idée d'un second dessin que voici :

« Oh mon Dieu ! Ton dessin est pire que ceux de Charlie Hebdo !! Ils vont courir après nous !
Eh ! Je veux vivre assez pour voir grandir mes petits-enfants !!! »
« Oh, allez, ce n'est pas si terrible…
Et puis de toute façon, ils ont probablement assez tué de dessinateurs…
Peut-être ont-ils laissé tomber cette idée… »
Le cartouche sous Aline, la femme de Crumb,
la désigne telle une « Épouse effrayée s'accrochant à la vie ».

Crumb évoque aussi, dans cette interviou, le fait qu'aucun grand journal américain n'a osé publier les caricatures de Mahomet précédemment publiées par Charlie Hebdo. Quant au New York Observer, il ne les a pas publiées non plus comme il n'a pas publié les deux dessins ci-dessus. Il faut aller en fin d'article pour trouver un lien renvoyant vers un blog américain affichant le premier d'entre eux.

L'occasion de lire ma chronique intitulée À bas la mitre, le foulard et la kipa !