Le vide pour quelques millions de dollars
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Le vide pour quelques millions de dollars

Combien coûte un art invisible ? Beaucoup d'argent, révèle CBC Radio dans un article intitulé New York artist creates 'art' that is invisible and collectors are paying millions (Une artiste new-yorkaise crée de l'art invisible pour lequel les collectionneurs paient des millions).



Lana Newstrom est une jeune artiste de vingt-sept ans qui crée de l'art invisible, nous apprend la radio canadienne anglophone CBC.

Amateurs d'art enthousiastes
admirant les peintures et les sculptures de Lana Newstrom
à la Schulberg Gallery de New York


« Ce n'est pas parce que vous ne voyez rien que je n'ai pas passé des heures de travail sur cette oeuvre », a-t-elle déclaré. « L'art requiert de l'imagination et c'est ce que mon travail demande aux gens qui le contemplent. Vous devez imaginer une peinture ou une sculpture devant vous. »

Persuadé qu'il tient la plus grande artiste vivante, Paul Rooney, l'agent de Lana Newstrom, se frotte les mains : « Quand elle décrit ce que vous ne voyez pas, vous commencez à réaliser pourquoi l'une de ses oeuvres invisibles peut atteindre plus d'un million de dollars », a-t-il confié à CBC Radio.

L'émission (en langage grand-breton, oeuf corse) peut être entendue par là.

Cette nouvelle pour le moins surprenante (mais qu'y a-t-il de vraiment surprenant dans le monde de l'art ?) a été reprise 40 000 fois sur internet, nous apprend Radio Canada (version francophone). Sauf que voilà, il s'agit en vérité d'un sketch de l'émission This is That, dont le logo est apparent sur la page annonçant l'émission. Ceux qui ont repris l'info se sont concentrés sur le texte, sans considérer vraiment de qui il émanait, l'en-tête de CBC Radio conférant à l'annonce un gage de sérieux gravé dans le marbre de l'autorité :


Un sketch, un gag, une galéjade.

« Dans le domaine artistique, il y a beaucoup de place pour l'interprétation et nous nous sommes dit qu'il serait intéressant de pousser l'idée jusqu'à l'extrême, soit l'art invisible », a déclaré l'un des créateurs de l'émission à Radio Canada. Lequel n'est pas vraiment surpris de l'ampleur prise par cette histoire : « Les gens lisent si rapidement sur Internet que plusieurs n'ont pas pris le temps de vérifier si c'était vrai ou pas. Nous encourageons les gens à écouter l'audio, car c'est là que se trouve la blague. Après l'avoir écouté, les gens auront beaucoup de mal à croire que c'est vrai. »

Quoique. De telles expositions pourraient être tout à fait sérieuses. Et de fait, il y en eut !

En 2012 se tint à la Hayward Gallery de Londres une expo intitulée Unseen (Invisible). Les lieux étaient entièrement vides à l'exception de toiles immaculées, de feuilles blanches et de socles ne supportant rien d'autre que l'air ambiant. Le britannique Telegraph en avait parlé, par là.

Amatrice d'art contemplant un socle vide


Bien avant, en 1958, Yves Klein avait réalisé une exposition intitulée La spécialisation de la sensibilité à l'état matière première en sensibilité picturale stabilisée - plus connue sous le nom d'exposition du Vide - dans laquelle il n'y avait absolument rien si ce n'est une paire de tentures encadrant du vide :


Le musée Beaubourg reprendra l'idée en 2009, l'expo s'appellera Vides - Une rétrospective :

Intéressant, n'est-ce pas ?


En 1952, John Cage composa 4'33, soit quatre minutes trente-trois secondes de silence. L'oeuvre fut interprétée par David Tudor, pianiste, « qui signala les débuts des parties en fermant le couvercle du clavier, et leurs fins en ouvrant le couvercle », nous dit la Wikipedia citant John Cage.

Au cinéma aussi on trouve du vide. Sur un mode satirique, cette fois, avec Prêt à porter de Robert Altman (1994). Dans cette bobine défilent des mannequins nus, que les spectateurs s'empressent d'applaudir :



On voit par là que ces comiques canadiens de CBC Radio, croyant pondre un gag inédit, ont réinventé l'eau tiède. Pfff !!!


L'occasion de lire ma chronique intitulée L'homme qui tombe dans laquelle apparaît Yves Klein se jetant dans le vide à Fontenay-aux-Roses en octobre 1960.

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