Eurodéputés : leur pouvoir (ou non)
Brève

Eurodéputés : leur pouvoir (ou non)

Qui a dit que les parlementaires européens ne font rien pour nous ? Cinq exemples à l'appui, le site FranceTV.info tente d’illustrer le pouvoir des eurodéputés pour "changer notre vie". Des avancées – ou plus exactement des empêchements de reculades – à mettre en parallèle avec le torpillage de la taxe sur les transactions financières dénoncé hier par l’ONG Oxfam ou l’association Attac.

L’initiative est louable : pour illustrer "le pouvoir croissant" des parlementaires européens, le site FranceTV.info a demandé à cinq d’entre eux de décrire la façon dont, grâce à leur mandat, ils ont changé nos vies. Sur les cinq combats cités, trois l’ont été pour contrecarrer des décisions de la Commission ou du Conseil européen.

Exemple : la lutte de l’eurodéputée UMP Elisabeth Morin-Chartier pour s’opposer "aux chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE, qui voulaient lever la distinction entre le fonds social européen et le fonds d'aménagement des territoires." Une façon de rapprocher les fonds destinés aux politiques d'emploi et ceux finançant les routes et infrastructures qui aurait nui à l’emploi, les élus préférant "inaugurer des ponts qu'ils ont financés plutôt qu'investir dans l'emploi. Un combat gagné puisque le fonds social européen a été préservé".

Autre exemple : "le député européen Front de gauche PatrickLeHyaric est l'un des artisans de la création dufonds européen d'aide aux plus démunis, qui permet, depuis le 1erjanvier 2014, d'aider des associations comme les Restos du cœur et la Croix-Rouge" explique FranceTV.info. Cela dit, cette victoire cache un échec cuisant puisque ce fonds vient pallier la suppression du programme européen d'aide aux plus démunis.

Copie écran du site de FranceTV.info

Enfin, l’eurodéputé UMP Franck Proust se targue d’avoir sauvé les aéroports régionaux en faisant reculer la Commission qui a accepté, in fine, de "permettre aux aéroports de moins de 700 000 voyageurs par an de continuer à bénéficier d'aides conséquentes". Mais si ces aéroports locaux améliorent en effet la vie des voyageurs, les aides vont surtout dans les caisses des compagnies low-cost qui assurent la grosse majorité du trafic, ce que dénonçait la Commission européenne. Comme le rappelaient Les Echos, "cette profusion de subventions […] peut parfois conduire à construire des aéroports là où iln'y a aucun besoin […] Surtout, elle fausse la concurrence entre compagnies aériennes, au profit avant tout de Ryanair. Les aéroports régionaux sont d'autant plus déficitaires et d'autant plus dépendants des aides publiques qu'ils versent souvent des sommes importantes pour attirer la compagnie aérienne irlandaise sur leur tarmac. Ce schéma a été visé par de nombreuses plaintes, notamment d'Air France".

Quant aux deux derniers combats, l’un a été mené par le socialiste Eric Andrieu afin de créer, dans le cadre de la politique agricole commune, une surprime aux cinquante premiers hectares visant à mieux soutenir les petits exploitants, et l’autre par la socialiste Catherine Trautmann pour supprimer les frais d'itinérance facturés par les opérateurs de téléphonie mobile quand leurs clients vont à l'étranger. Petit bémol cependant : cette suppression doit encore être approuvée par le Conseil européen et la Commission

L'échec de la taxe sur les transactions financières

Des combats exemplaires certes mais qui vont avoir dû mal à faire oublier l’échec patent sur l’un des grands sujets attendus de longue date : la mise en place d’une taxe européenne sur les transactions financières (TTF) mille fois claironnée, mille fois reportée – on vous détaillait tout dans cette chronique. Dans un communiqué daté du 9 avril, les eurodéputés socialistes, qui assurent se battre depuis des années pour l'instauration de cette taxe, affirment que la TTF est "désormais soutenue par la majorité au Parlement européen, pourtant dominé par la droite". Les socialistes confient également rester "vigilants pour que cet instrument ne se limite pas à singer un simple impôt de bourse. La spéculation et la finance prédatrice doivent être mises à bas."

Mais leur vigilance n’aura pas suffi : si les ministres des finances européens ont finalement annoncé hier sa création au plus tard le 1er janvier 2016, cette taxe concernera les actions et non les produits dérivés. Du coup, comme le soulignent Les Echos, "la taxe sur les transactions financières se résume plus ou moins au vieil impôt de Bourse ou à l’actuelle taxe française et ne correspond plus du tout à son objet : être un impôt très faible sur une large base, qui freine la spéculation, notamment le trading haute fréquence, et génère des recettes substantielles. […] Le projet ne représenterait qu’entre 5 et 6,4 milliards d’euros au lieu de 34milliards de recettes, initialement promises par la Commission". La spéculation et la finance ont encore de beaux jours devant elles.

Par ailleurs, cette décision est un accord en trompe l’œil pour l’ONG Oxfam, qui dénonce au passage le renoncement de François Hollande, lequel "s’était pourtant engagé à plusieurs reprises à convaincre ses homologues européens d’en consacrer une grande partie aux enjeux de solidarité internationale, la lutte contre le changement climatique ou la lutte contre le SIDA". Pour l’heure, on ne sait à quoi sera affecté cette taxounette. L’association Attac va même plus loin : "de tous les renoncements accumulés depuis son élection, celui-ci est le plus symptomatique de la dérive ultralibérale du président de la République. Car c’est le seul dossier économique sur lequel il n’a pas hésité à s’opposer très fermement à l’Allemagne et à la Commission, qui désiraient au contraire taxer l’ensemble des produits dérivés."

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