Le "blackface" d'une journaliste de Elle
Brève

Le "blackface" d'une journaliste de Elle

Un article paru hier mardi 26 novembre dans Metronews et signé David Perrotin nous apprend qu'une journaliste de Elle vient de  provoquer la polémique et l'indignation aux États-Unis.

L'article, titré "Blackface" : se déguiser en noir, c'est être raciste ? nous raconte l'histoire de Jeanne Deroo, rédactrice beauté du magazine Elle, qui a posté sur Instagram une photo d'elle grimée en Noire. L'image scandaleuse a bien vite atterri sur les ordis de la presse américaine qui s'est déchaînée, l'a traitée de raciste. Voir par là, par là ou encore par là.


Car aux USA, se déguiser en Noir quand on est blanc, pratique connue sous le nom de blackface, est un acte éminemment raciste qui renvoie à la ségrégation et aux minstrels, ces groupes de musiciens blancs qui pillaient la musique des Noirs et se noircissaient le visage pour les singer :

Les Moore and Burgess Minstrels, le 16 juin 1900


La journaliste de Elle s'est bien vite confondue en excuses :

"Je n’avais pas conscience de la gravité de mon acte quand je me suis rendue samedi soir dernier, à une fête privée dont le thème était “Icônes”, et où j’ai choisi d’incarner Solange Knowles dont je suis fan. J’ai posté lors de cette soirée un Instagram de moi sans vouloir blesser quiconque. Je suis profondément désolée et je tiens à présenter toutes mes excuses."

Bon. S'il est peut-être idiot de se grimer en Noir, même pour rendre hommage à une artiste qu'on aime, il l'est encore plus de se confondre en excuses parce que des journalistes d'Outre-Atlantique crient au scandale. Jeanne Deroo eût été plus inspirée en adressant un "Pffft !" poli à la presse étazunienne qui tente de nous imposer l'Histoire honteuse de son pays.

Nous, Français, n'avons pas le même passé que les Américains. Nous n'avons pas à porter le poids de leur honte, la nôtre nous suffit amplement. Car si nous avons aboli bien tardivement l'esclavage grâce à Victor Shoelcher en 1848, si nous pratiquons allègrement le racisme au quotidien, si nous avons exhibé des Africains (et pas seulement eux) lors des expositions coloniales…

Les Amazones de Béhanzin
au Jardin d'acclimatation de Paris, en 1892


… nous n'avons pas promulgué de lois ségrégationnistes - qui ne furent définitivement abolies qu'en 1964 - interdisant aux Noirs de boire aux mêmes robinets que les Blancs :

Homme s'abreuvant à un distributeur d'eau réservé aux Noirs
en Caroline du Nord par Elliott Erwitt, 1950


Nous n'avons pas interdit aux enfants noirs d'aller dans les mêmes écoles que les enfants blancs :

Collégien manifestant contre l'ouverture de l'école
aux élèves noirs à Clinton, Tennessee, le 27 août 1956


Nous n'avons pas relégué les Noirs au fond des bus :

Photo de Hank Walker prise à Charleston,
Caroline du sud, 1956


Nous n'avons pas suspendu de Noirs aux branches des arbres, tels d'étranges fruits chantés par Billie Holiday :

Deux hommes victimes de lynchage
à Marion, Indiana, août 1930


Nous n'avons pas acquitté, le 13 juillet 2013, l'assassin de Trayvon Martin :


Nous avons dans ce domaine bien d'autres hontes, c'est sûr. Mais pas celles-là, que nous laissons aux Américains. Lesquels feraient bien de cesser d'imposer leurs modes de pensée au reste du monde, qu'ils considèrent comme leur vassal. Car ça aussi, c'est du racisme.


L'occasion de lire ma chronique intitulée Avant Depardieu, d'autres Blancs noircis où il est question de minstrels, et aussi Comme un goût de Strange Fruit, Tintin au Congo expliqué à Boule de Neige, et d'autres encore.

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