Tous les Parisiens sont des Amélie Poulain
Brève

Tous les Parisiens sont des Amélie Poulain

Pascal Riché (cofondateur de Rue89) s'étonne, sur son blogue Mon Oeil !, de la vision qui est donnée de notre belle capitale à travers les réclames pour Thalys actuellement visibles dans le métropolitain parisien.

Photos © ma pomme


C'est l'affiche concernant la liaison Paris-Düsseldorf qui l'a d'abord surpris : "Tiens, un bonnet rouge sur cette affiche vantant la proximité ferroviaire entre Paris et Düsseldorf. Je m’approche pour vérifier qu’elle n’a pas été détournée, moyennant un facétieux collage, par des militants bretons. Mais non. Simple coïncidence.
Ce n’est pas ce bonnet qui rend cette affiche intéressante.
Ce n’est pas non plus l’orientation sexuelle du couple qui figure sur l’affiche, l’un portant Paris sur ses épaules, l’autre ayant Düsseldorf lové dans sa capuche."

Précisons de suite que cette campagne publicitaire n'est qu'une réédition, elle a déjà fleuri sur les murs du métro en mai 2013, époque à laquelle les bonnets rouges bretons n'étaient pas encore d'actualité, celui-là est bien un bonnet teuton.

Ce qui a frappé Pascal Riché, "c'est la représentation très différente des deux villes". Düsseldorf y apparaît, avec des constructions récentes, telle une cité tournée vers l'avenir :


Alors que Paris, avec sa tour Eiffel, son Arc de Triomphe, sa cathédrale et son Sacré-Coeur, a tout l'air d'une ville musée :


"Paris=Venise. Question : celui qui a conçu cette affiche était-il conscient de cette image de Paris qu’il projetait ? Ou bien l’idée que Paris est désormais une ville prisonnière du passé, incapable de se projeter vers l’avenir – impression qui englobe peut-être aussi la France – s’est-elle installée subrepticement dans sa tête, dans nos têtes, pour s’y ancrer ? ", conclut Pascal Riché.

Cependant, si l'on considère les trois affiches de cette campagne qui nous présentent des villes-maquettes pour ferrovipathes patentés…


…on s'aperçoit que Cologne y apparaît elle aussi telle une ville ancienne dominée par sa cathédrale. Avec, il est vrai, quelques constructions récentes :


Quant à Amsterdam, elle est tout entière blottie le long de ses canaux, surplombés par un moulin. Pas l'ombre d'une construction moderne !


Ce n'est pas ce qui manque à Amsterdam, pourtant. Le quartier des docks, par exemple, a considérablement changé ces dernières années :

Le Muziekgebouw aan 't IJ
le Bâtiment musical sur l'IJ
(source)


On pourrait citer également le Van Gogh Museum créé par Gerrit Rietveld en 1973, dont voici l'aile réservée aux expos temporaires qui, elle, fut créée par Kisho Kurokawa en 1999…

(source)


… et bien d'autres monuments encore. Le Centre d'Architecture d'Amsterdam (l'ARCAM) est un lieu intéressant pour qui s'intéresse à ce domaine.

Immeuble de l'ARCAM à Amsterdam
(source)

Dans les commentaires suivant ce billet de Pascal Riché, une internaute signale que "les villes allemandes ayant été particulièrement détruites durant la seconde guerre mondiale (en particulier celles qui avaient un patrimoine industriel) et par les Allemands eux-mêmes ensuite (pour justement rompre avec le passé), il est donc assez logique que les villes semblent… modernes en effet."

Il est vrai que Cologne et Düsseldorf furent touchées en 1942 et 1943, ce qui n'est pas le cas de Paris ou d'Amsterdam.

Mais c'est un autre commentaire qui pointe le véritable problème de ces affiches : "Ce qui est malheureux, c’est que cette campagne s’adresse manifestement à l’autochtone, qui lui sait pourtant que sa ville ne se limite pas à des vieux quartiers et quelques chats sur les toits."


Eh oui. On présente aux Parisiens un Paris pour touristes, un Paris fait d'immeubles des XVIIIe et XIXe siècles en modèles réduits, un Paris qui n'existe pas mais qui, selon les publicitaires, se vend bien. Même aux Parisiens qui ne connaissent évidemment ni la pyramide du Louvre, ni La Cité de la Musique, ni la Grande Arche de La Défense, ni la Bibliothèque François Mitterrand, ni le Pavillon de l'Arsenal dédié à l'architecture parisienne. Car c'est bien connu, tous les Parisiens sont des Amélie Poulain.


L'occasion de lire ma chronique intitulée L'Inde à Paris !

Mise à jour, 17h06

Un fort aimable @sinaute a pensé, en lisant cet article, aux "Archéologues" peints par De Chirico en 1927 :


Partager cet article Commenter

 

Cet article est libre d’accès
En vous abonnant, vous contribuez
à une information sur les médias
indépendante et sans pub.

Déjà abonné.e ?

Voir aussi

Ne pas manquer

DÉCOUVRIR NOS FORMULES D'ABONNEMENT SANS ENGAGEMENT

(Conditions générales d'utilisation et de vente)
Pourquoi s'abonner ?
  • Accès illimité à tous nos articles, chroniques et émissions
  • Téléchargement des émissions en MP3 ou MP4
  • Partage d'un contenu à ses proches gratuitement chaque semaine
  • Vote pour choisir les contenus en accès gratuit chaque jeudi
  • Sans engagement
Devenir
Asinaute

5 € / mois
ou 50 € / an

Je m'abonne
Asinaute
Généreux

10 € / mois
ou 100 € / an

Je m'abonne
Asinaute
en galère

2 € / mois
ou 22 € / an

Je m'abonne
Abonnement
« cadeau »


50 € / an

J'offre ASI

Professionnels et collectivités, retrouvez vos offres dédiées ici

Abonnez-vous

En vous abonnant, vous contribuez à une information sur les médias indépendante et sans pub.