Islande : un mythe tombe ?
Brève

Islande : un mythe tombe ?

Adieu Islande la rebelle. Avec la victoire de la droite aux élections législatives de ce week-end, les Islandais ont plébiscité le retour des partis qui, en libéralisant le secteur financier, ont conduit l’île dans une grave crise économique. Un camouflet pour la gauche et "une gueule de bois pour tous ceux qui s’étaient persuadés qu’il existait sur la planète un petit peuple lucide entré en résistance contre la finance et les idées néolibérales" estime Pascal Riché sur Rue 89.

Camouflet, le mot n’est pas trop fort. Au pouvoir depuis 2009, la coalition socio-démocrates/gauche-verts recueille moins de 25% des suffrages exprimés à l’occasion des élections législatives de samedi dernier. Les deux partis perdent ainsi la moitié de leurs sièges au Parlement. Grand gagnant : le parti de l’Indépendance (conservateur) suivi du Parti du progrès (centre-droit). A noter, car c'est une première : le parti Pirate remporte 5% des voix soit trois sièges au Parlement. Contrairement à la tradition qui veut que le chef de file du parti vainqueur prenne la tête du gouvernement, le président islandais, Olafur Ragnar Grimsson, a demandé au centre-droit Sigmundur David Gunnlaugsson de former une équipe gouvernementale. Un choix qui, selon Pascal Riché, journaliste de Rue89, n’a pas provoqué de remous.

Riché s’étonne : "les Islandais ont samedi ramené la droite au pouvoir, celle-là même qui les a plongés dans une crise sans précédent en 2008. […] Pour un parti qui a mis le pays à sac, c’est une prouesse." D'autant que l'ancien premier ministre du parti de l'Indépendance, Geir Haard, a été reconnu coupable de la faillite de son pays au terme d'un procès mené contre lui, une première évoquée ici.

Pourtant, ajoute Riché, les socio-démocrates n’avaient pas démérité : "l’Islande, frappée par une crise financière gigantesque à son échelle, a retrouvé le chemin de la croissance et son chômage a diminué de moitié (de 10% à 5%)."

Pourquoi l'échec est-il si cinglant ? Selon l’ancienne premier ministre citée par Riché, "sa coalition paye le prix des mesures d’austérité imposée aux Islandais (même si ces mesures avaient été en réalité engagées en 2008, en coopération avec le FMI, sous la droite). Les Islandais se plaignent également de la persistance du contrôle des changes et de la baisse du pouvoir d’achat liée à la dévaluation". Un revers qui peut aussi s’expliquer par les positions pro-européennes des partis jusque-là au pouvoir : "la volonté des socio-démocrates d’arrimer la couronne islandaise à la monnaie unique européenne – qui s’est traduite par l’ouverture de négociations avec l’Union – n’était pas non plus très populaire depuis la crise de la zone euro". D’ailleurs, selon la dépêche AFP citée par Libération, "la victoire du centre-droit enterre probablement la candidature de l’Islande à l’Union européenne, lancée en 2009, et à laquelle les deux partis étaient hostiles."

Au passage, Riché égratigne ceux qui érigent l’Islande comme un modèle de lutte contre la financiarisation du monde pour avoir refusé, en 2008, de sauver leurs trois banques en faillite, laissant le soin aux Anglais et aux Néerlandais de régler l’ardoise dans leurs pays respectifs. Une décision qui n’a pas plu à la Commission européenne, laquelle a porté plainte contre l’Islande avant de se faire débouter comme nous vous le racontions ici. Riché fait également la nique à ceux qui considèrent l’Islande comme la figure de proue de la démocratie : "quant aux deux grands projets visant à renforcer la démocratie en Islande, la constitution «participative» (qui n’a toujours pas été votée par le Parlement) et le projet visant à faire du pays un paradis pour la liberté d’expression, l’Initiative islandaise pour la modernisation des médias, ils sont voués à rester un moment dans les limbes."

Reste tout de même le discours du président Olafur Ragnar Grimsson capté en janvier à l’occasion du forum économique de Davos, un discours repris sur @si et qui disait : "pourquoi considère-t-on que les banques sont des saintes-chapelles de l'économie moderne ? La théorie que vous devez payer pour sauver les banques est une théorie selon laquelle les banquiers peuvent jouir de leurs propres bénéfices et de leur succès, puis que les gens ordinaires payent pour leurs échecs au moyen des impôts et de l’austérité, et dans les démocraties éclairées, les gens ne l’accepteront pas sur le long terme."

Mais les Islandais ne sont manifestement pas d'accord avec leur président.

Pour un rattrapage sur la crise islandaise en débat sur notre plateau, c’est ici. Et sur l'Islande qui se rêve eldorado du journalisme d'investigation, vous pouvez lire cet article.

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