Manifestation du 9 janvier : "Le but était de terroriser"
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Manifestation du 9 janvier : "Le but était de terroriser"

Un vidéaste, ancien de la préfectorale, a filmé un tir de LBD à bout portant

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Dans une autre vie, il était haut fonctionnaire, et a déjà dû gérer des manifestations. Depuis le mouvement des Gilets jaunes, il manifeste et filme les cortèges pour sa chaîne YouTube. Et ce jeudi 9 janvier, Laurent Bigot dit avoir assisté à un summum de violence policière lors de la manifestation contre la réforme des retraites à Paris. Il raconte à ASI.

Des coups de matraques, les pluies de gaz lacrymogène, les "poc" réguliers des tirs de LBD, des grenades de désencerclement qui explosent entre les jambes... Si les manifestations françaises se déroulent rarement sans leur lot de violences policières depuis le mouvement des Gilets jaunes, celle du jeudi 9 janvier à Paris semble avoir franchi un nouveau cap. Parmi les manifestants venus défiler contre la réforme des retraites, Laurent Bigot, ancien haut fonctionnaire de 48 ans, qui a notamment occupé les postes de directeur de cabinet, dans les préfectures de Martinique et de Corse du Sud. C'est lui qui a filmé un policier tirer au LBD à bout portant sur un manifestant (une pratique totalement contraire aux règles d'utilisation et potentiellement mortelle), un épisode relayé par David Dufresne sur son compte Twitter. Une enquête, confiée à l'IGPN, a d'ailleurs été ouverte suite à la diffusion de la vidéo. Au-delà de cette scène, Laurent Bigot dit avoir vécu ce jeudi la manifestation la plus férocement réprimée depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, qu'il suit assidûment. Il raconte à Arrêt sur images

ASI : - Vous avez diffusé beaucoup de vidéos de la manifestation de jeudi soir sur Twitter. Étiez-vous dans le défilé pour filmer, ou pour manifester ? 

Laurent Bigot : - Depuis un an, je filme les manifestations de Gilets jaunes avec ma fille de 19 ans. Nous avons une chaîne YouTube, AB7 Média, sur laquelle nous diffusons nos reportages. Nous avons fait des actes de Gilets jaunes à Paris, à Nantes, à Bordeaux, à Toulouse... Et depuis décembre, nous faisons la même chose sur les manifestations contre la réforme des retraites. Mais j'y vais aussi pour manifester, je suis pour les Gilets jaunes, et je suis contre la réforme des retraites. C'est lorsque nous avons été confrontés à la violence policière que nous avons commencé à filmer. Mais jeudi, j'étais tout seul, sans ma fille. 

"Une stratégie de maintien du désordre"

ASI : - Jeudi, quand rejoignez-vous le cortège, et à quel endroit ? 

Laurent Bigot : - J'arrive place de la République à midi. Je mange un casse-croûte à côté d'un cordon de forces de l'ordre, et je commence à arpenter la place vers midi et demi. Puis le cortège commence à se mettre en place pour s'élancer. Mais avant même qu'il démarre, les forces de l'ordre coupent la tête de cortège du reste des manifestants, empêchant ainsi la manifestation de démarrer. Il n'y avait pourtant aucune violence de la part des manifestants. Les gars de la RATP ont donc commencé à avancer contre les flics, pour faire démarrer la manifestation. Là, les policiers ont commencé à matraquer, et à envoyer des gaz lacrymogènes. Quand j'étais haut fonctionnaire, j'ai eu à m'occuper de maintien de l'ordre. Eh bien là, je ne vois pas du tout l'idée derrière la manœuvre, si ce n'est de pourrir le mouvement avant même qu'il ne commence, comme ça avait déjà été le cas le 5 décembre [lors d'une précédente manifestation contre la réforme des retraites, filmée elle aussi par Laurent Bigot, ndlr].  

ASI : - Finalement, la manifestation a démarré ? 

Laurent Bigot : - Les syndicalistes ont essayé de calmer les esprits, ils ont compris la manœuvre des policiers, et ils voulaient à tout prix que le cortège parte. Une fois démarrée, la manifestation se déroule normalement jusqu'à Saint-Lazare. Une fois là-bas, le cortège poursuit direction place Saint-Augustin, où le défilé devait se terminer. Mais là, les forces de l'ordre séparent à nouveau la tête du cortège du reste des manifestants. Et elles commencent à pousser la tête vers Saint-Augustin tout en empêchant le reste d'avancer. Moi, je suis du côté de la tête de cortège. Et là, pendant une bonne heure, ça devient de pire en pire. C'est là que je filme le tir de LBD à bout portant, à 16h05. 

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